• Histoire: Opération Barbarossa . L’hiver est-il....

     

    Opération Barbarossa . L’hiver est-il responsable de la défaite d’Hitler en Russie ?

     

     

    « L’hiver russe a brisé la Wehrmacht » ; « Le froid et la neige stoppent l’avancée allemande ».
    Ces titres, souvent employés dans le cadre de l’opération Barbarossa, tendraient à mettre l’échec des Allemands sur le compte des aléas climatiques.
    Certes, les hivers 1941-1942 et 1942-1943 ont été particulièrement rigoureux mais non exceptionnels.
    On pourrait également souligner que si les Allemands ont souffert du froid, les Soviétiques également.
    La Retraite de Russie de Napoléon Ier est, elle aussi, souvent imputée au terrible hiver russe.

    Le « Général Hiver », terme employé par les historiens, ne serait-il pas un mythe propre aux grandes batailles ?
    Dans quelle mesure le climat a t-il joué un rôle dans l’échec de l’offensive allemande en Russie ?

     

    Opération Barbarossa

     

    Barbarossa est le nom de code, choisi par Hitler, pour l’invasion de l’Union soviétique. « Barberousse » était le surnom de l’empereur allemand Frédéric Ier (1122-1190) qui partit en croisade contre les Turcs.
    Hitler a pu donner l’impression qu’il partait lui-même en croisade contre le bolchévisme mais ses réelles motivations étaient bien plus matérialistes.

     

    Hitler

    Mars 1941. Hitler au premier plan. A l'arrière, Göring. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    La date du 22 juin n’est probablement pas un hasard puisque Napoléon Ier a envahi la Russie un 22 juin.

    L’opposition entre l’Allemagne nazie et la Russie communiste avait été largement soulignée par Hitler dans Mein Kampf, écrit en prison entre 1923 et 1924. Les principes du national-socialisme y sont exposés : antisémitisme, supériorité de la race germanique, qui a besoin pour s'épanouir d'un « espace vital » et culte de la force.

    L’offensive a été soigneusement préparée plusieurs mois avant l’attaque.

    Officiers allemands en Ukraine

    Aout 1941. Ukraine. Officiers de l'armée allemande(Deutsches Bundesarchiv)

     

    Endormi par le Pacte germano-soviétique, signé le 23 août 1939, Staline s’est laissé surprendre par la rapidité de l’offensive allemande.

    Pourquoi Hitler a t-il rompu ce pacte ?

    On peut mettre en avant trois causes principales :

    • Etendre les possessions allemandes
    • Lutter contre le bolchévisme
    • S’accaparer les richesses des sous-sols soviétiques

    Si on s’en réfère aux décisions prises par Hitler qui ont d’ailleurs conduit l’armée allemande à la défaite, il semble évident que les richesses du sous-sol caucasien, principalement le pétrole, représentent la principale motivation du führer.

    Les premières victoires allemandes

    En ce 22 juin 1941, l’été commence lorsque  plus de 3 millions de soldats allemands, appuyés par 3 350 chars et 2 815 avions, pénètrent en territoire soviétique.

    Les 152 divisions allemandes déferlent sur une ligne de front de la mer Baltique à la mer Noire.

     

    Soldat soviétique fait prisonnier

    Septembre 1941. Russie. Un soldat soviétique fait prisonnier. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Staline est surpris par l’attaque. L’armée soviétique, désorganisée, est balayée. Les Allemands font des centaines de milliers de prisonniers.

    Les chars soviétiques sont techniquement dépassés. En deux jours, la Luftwaffe écrase au sol et dans les airs la vétuste aviation soviétique.

    L’avancée allemande est foudroyante avec des blindés qui parcourent plus de 40 km chaque jour. Devant ce désastre, Staline ordonne la politique de la terre brulée.

     

    Offensive allemande en Russie

    Juin 1941. Russie. Des soldats tués à côté d'un char en flammes. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Les principaux évènements entre juin et août 1941

     

     22 juin : A 3h15 du matin, l’Allemagne attaque l’Union soviétique sans déclaration de guerre

    La Roumanie, la Hongrie, la Slovaquie et l’Italie participent à la guerre aux côtés des Allemands.
    L’Espagne, officiellement « neutre »,  envoie la division Azul pour lutter contre le communisme.

     Dès le 29 juin, les panzers de Guderian ont fait leur jonction avec ceux de Hoth à Minsk.

     Juillet : Staline demande des armes aux Etats-Unis. Bialystok et Minsk tombent. Les Allemands font plus de 300 000 prisonniers.
    Contrairement au plan initial et l’avis de ses généraux, Hitler décide de retarder l’offensive sur Moscou.
    Il privilégie l’avancée sur Leningrad et en Ukraine.

    Soldats allemands et prisonniers russes

    Juin 1941. Russie. Prisonniers russes. Auteur: Hähle, Johannes. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Le 28 juillet, Smolensk est encerclé. Les Soviétiques utilisent pour la première fois des lance-roquettes Katiouchka ou « Orgues de Staline ».

    Août : Pour ralentir les troupes allemandes, Staline donne ordre de faire sauter le barrage du Dniepr qui est le plus grand complexe hydroélectrique du monde.
    Malgré tout, les Allemands franchissent le fleuve.

    5 août : Smolensk tombe.

    Et si Hitler n’avait pas stoppé l’avancée du général Guderian ?

    Le 27 juillet, alors que le général Guderian continue son avancée vers Moscou, Hitler lui ordonne de descendre vers le sud.
    L’objectif est de s’emparer des centres industriels. Guderian proteste mais doit obéir.

    La marche vers Moscou ne reprendra que début octobre. Cependant, entre temps, la défense soviétique s’est organisée et l’hiver est là.

     

    Offensive allemande en Russie

    22 décembre 1941. Russie. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    C’est la première grosse erreur stratégique d’Hitler qui n’écoute pas ses officiers.

    L’armée allemande est stoppée à environ 30 km de Moscou. La défense est acharnée et le froid glacial.

    C’est à partir de ce premier échec que le « vent » va tourner en faveur des Russes.

    Si Hitler n’avait pas ordonné à Guderian de fléchir sa route, il serait arrivé à Moscou bien avant l’hiver et sans que la défense ait eu le temps de s’organiser.

    Et si la haine raciale d’Hitler ne l’avait pas aveuglée ?

    Selon les termes de l’Ostplan (plan pour l’Est), élaboré par Himmler, l’armée allemande doit faire preuve d’un « manque total de pitié » à l’égard des populations civiles.
    Hitler parle d’une « lutte d’extermination ».

    Pour préparer l’implantation des Allemands sur les territoires de l’Est, les sinistres Einsatzgruppen font régner la terreur et la destruction.

     

    Déportation de Juifs en Russie

    Juillet 1941. Déportation des juifs en Russie. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Ce sont de petites unités de la police et de la SS. Elles ont pour ordre d’exterminer tous les individus jugés indésirables.
    Les victimes sont abattues à la mitraillette ou d’une balle dans la tête. Les cadavres sont empilés dans des fossés.

    A Babi Yar, près de Kiev, 33 771 Ukrainiens juifs sont massacrés dans un ravin en deux jours.

    On estime qu’entre juin 1941 et janvier 1942, les Einsatzgruppen ont tué environ 750 000 personnes.

    Plus de 3 millions de prisonniers russes sont morts en captivité. A la chute de Kiev, le 19 septembre 1941, les 65 000 prisonniers sont laissés sans soins et sans nourriture.

     

    Massacre de civils russes en 1941

    3 juillet 1942. Soldats russes tués. Auteur: Hermann. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Il faut souligner le fait que de nombreux officiers de la Wehrmacht ont protesté contre ses massacres qui dressent les populations contre l’occupant alors qu’au départ, elles étaient bien disposées.
    En effet, les populations sont lasses des purges et de la terreur que fait régner Staline.

    Au début de l’invasion elles sont prêtes à coopérer mais déchantent vite devant la barbarie des Einsatzgruppen.

    Les atrocités allemandes provoquent le revirement des populations conquises. Les perturbations commises par les partisans sur les communications et le ravitaillement ralentissent considérablement l’avancée des troupes allemandes.

     

    Pendaison de partisans russes en 1941

    Janvier 1943. Des partisans russes sont pendus . Auteur: Koch. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Une fois de plus, Hitler n’écoute pas ses généraux et se laisse aveugler par sa haine raciale.

    C’est la deuxième grosse erreur commise et pas la moindre car on peut se demander ce qui se serait passé si une majorité des populations avait aidé l’occupant.

    Les premiers échecs de l’armée allemande

    Le 8 septembre 1941, l’armée allemande est aux portes de Leningrad. Hitler a donné l’ordre de mettre en place un blocus complet afin que la famine provoque la réédition de la population.

    Mais Leningrad va devenir un symbole de résistance. La ville sera libérée par l’Armée rouge le 27 janvier 1944 après un blocus de 872 jours.
    Un million d’habitants sont morts de faim, de maladie et des bombardements.

     

    Artillerie allemande

    Juin 1942. Artillerie allemande. Auteur: Nieberle. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    La chute de Moscou aurait peut-être entraîné la capitulation de l’Union soviétique. Mais, l’opération « Tempête d’hiver »  lancée par Hitler le 20 octobre 1941 sera un échec.
    Pourtant, il engage dans l’offensive 77 divisions  d’environ 15 000 hommes chacune, près de 20 000 canons et mortiers, 1 700 chars et 950 avions.
    Les Soviétiques engagent le même nombre de divisions mais avec seulement 6 000 hommes chacune et la moitié d’artillerie et de chars.
    Leur aviation est trois fois moins importante.
    Par contre, les nouveaux chars T-34 soviétiques se révèlent beaucoup plus rapides et puissants que les chars allemands.

     

    Police militaire allemande

    Aout 1941. Russie. Police militaire allemande. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    La résistance soviétique est acharnée. Après des pertes énormes, Hitler se décide à arrêter l’offensive le 5 décembre 1941.
    L’armée allemande est alors repoussée de plus de 120 km.
    Moscou est sauvé.

     

    Le siège de Stalingrad

    En  juin 1942, l’offensive allemande continue dans le Caucase. Aidés des Roumains, des Italiens et des Hongrois, les Allemands franchissent le Don (un fleuve) et le général  Paulus lance ses troupes à l’assaut de Stalingrad.
    Stalingrad ne doit pas tomber. 
    Staline est clair : »Ne plus reculer d’un pas »

     

    Armée allemande près de Stalingrad

    23 septembre 1942. Infanterie allemande près de Stalingrad. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    125 000 civils volontaires sont enrôlés dont beaucoup d’adolescents, de femmes et de vieillards. 
    Les Allemands ont réussi à pénétrer dans les faubourgs de la ville qui est d’ailleurs en ruines. Il va falloir toute la volonté et la détermination de chaque russe pour reconquérir la ville, maison par maison.

    Stalingrad

    Stalingrad. 22 décembre 1942. Auteur: Gehrmann, Friedrich. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Fin novembre 1942, 270 000 soldats allemands sont encerclés à Kalatch. Paulus a ordre de ne pas se rendre.
    Mais, faute de ravitaillement, les soldats manquent de nourriture et de munitions. Le froid est intense. 
    Paulus est nommé feld-maréchal par Hitler ce qui se traduit par « Plutôt le suicide que la capitulation ».
    Mais, Paulus se rend le 3 février avec un bilan très lourd : sur les 270 000 hommes encerclés, 34 000 ont été blessés, 7 000 se sont enfuis, 90 000 sont morts.
    A l’issue de la guerre, seulement 6 000 hommes reviendront de captivité.

     

    Siège de Stalingrad

    Stalingrad. Octobre 1942. Auteur: Rothkopf. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    En 1942, le froid est arrivé de manière précoce. Entre décembre et février, la température est régulièrement descendue en dessous de 30°C.
    Mais là encore, le froid a été un handicap pour les deux camps. Si Stalingrad a été sauvé, c’est avant tout grâce à la détermination de la population et à une meilleure organisation de l’armée soviétique.

    Le général Hiver

    Je ne nie pas que les conditions climatiques exécrables ont joué un rôle dans le déroulement de ce conflit mais ce rôle n’a pas été décisif.

    Le plus gros handicap des allemands était d’être très éloignés de leurs bases. Les premières chutes de neige ont commencé dès la mi-septembre 1941 alors que les soldats étaient en tenue d’été.
    Ils n’ont reçu leur tenue d’hiver que deux mois après et parfois plus selon les zones.

     

    Stalingrad. General Paulus

    Novembre 1942. Général Paulus . Auteur: Jesse. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    L’approvisionnement a été retardé par le temps (gel puis dégel) mais surtout par les attaques des partisans.

    En définitive, le seul véritable responsable de la débâcle allemande est Hitler lui-même. Persuadé de son génie, il a pris plusieurs décisions qui se sont avérées catastrophiques.
    Très grand admirateur de Napoléon Ier, il possédait la même arrogance et le même mépris pour la vie.

    Par contre, à l’inverse de son modèle, il a préféré le suicide plutôt que d’affronter ses juges.

     

    Massacre de civils en Russie

    Minsk. Civils russes tués. (Deutsches Bundesarchiv)

     

    Ce dossier n’engage que moi et l’on pourrait en débattre plus longuement car 5 pages ne peuvent résumer l’offensive allemande en Union soviétique.
    N’hésitez d’ailleurs pas à me faire part de votre opinion et à apporter de nouveaux éléments en faveur ou non du général Hiver.

    Véronique Battaglia (09.06.2009)

     

    Photos d'archives sur l'invasion allemande en URSS . 1933. l'avènement d'Hitler

    Crédit photographique

    Les photos proviennent des Archives Fédérales Allemandes (Deutsches Bundesarchiv). Les photos sont sous licence Creative Commons Attribution ShareAlike 3.0 Germany (CC-BY-SA).

     

    Commentaires des Internautes

    Philippe (10.06)

    Au-delà du froid qui a joué un rôle important dans la débâcle allemande, il y a d'autres points qui sont tout aussi important. 
    Ce n'est pas le froid qui est le vrai problème... les Allemands comptaient gagner la guerre avant l'arrivée de l'hiver. C'est d'ailleurs pour ça que les troupes allemandes ont énormément souffert du froid... ils n'avaient aucun équipement pour l'hiver. Ils piquaient les manteaux et bottes des soldats russes pour se protéger. 
    Hitler grand "fan" de Napoléon savait très bien qu'il fallait battre les Russes avant l'arrivée de l'hiver mais c'est l'automne qu'il n'avait pas prévu. Il a énormément plu et c'est surtout la boue qui a totalement freiné l'offensive allemande. Les routes étaient impraticables et les Allemands avaient tellement percé loin que les lignes d'approvisionnement étaient trop longues.

    La plupart des véhicules allemands n'étaient pas adaptés à circuler dans de la boue trop profonde. 
    Du coup l'approvisionnement en vivres et munitions était chaotique. La logistique est un élément déterminant en temps de guerre... et elle n'a pas été à la hauteur.

    Avec les pluies sont aussi arrivées les premières épidémies.

    Ensuite, comme il est souligné dans le dossier, Hitler a commis une erreur stratégique. 
    Séparer en 3 corps son invasion : une au Nord pour prendre Leningrad, une au centre pour foncer sur Moscou et une au sud pour prendre le pétrole dans la région de Bakou.

    Du coup le front était beaucoup trop grand et aucun des 3 corps d'armée n'a rempli son objectif. 
    Moscou n'avait pas de valeur stratégique mais purement symbolique et le pétrole de Bakou bien trop loin.

    Autre grosse erreur de l'état major allemand... le fait d'avoir sous estimé le réservoir humain de l'armée russe. Après la campagne éclatante de Barbarossa, les services de renseignement allemands étaient persuadés que l'armée rouge était saignée à blanc et ne disposait plus de grosses réserves alors que Staline possédait encore un réservoir humain très important d'unités de l'Est (sibériens notamment).

     

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