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    Sancerre, « village préféré des Français »

    2021

     

    Par Sophie Denis
     
    source : Détours en France HS 13 - Les villages préférés des Français 2021
     
    Publié le 01/07/2021
     

    Entre vallée de la Loire et campagne berrichonne, la cité médiévale des comtes de Sancerre est juchée sur une opulente colline au-dessus d’un méandre du fleuve. Plus connue pour ses vins que pour son patrimoine, elle offre pourtant de jolies découvertes au visiteur curieux, qui racontent un passé mouvementé. Son charme et son histoire ont fait d'elle le « Village préféré des Français » 2021 ! Un titre qu'elle doit aux téléspectateurs de l'émission éponyme présentée par Stéphane Bern, dont la 10e édition était diffusée hier soir sur France 3.

     
     
    Sancerre et son vignoble, dans le Berry (Cher)

    Vu en contrebas depuis la D920 ou le canal latéral à la Loire, Sancerre, juché sur son piton, a cet air de défi des sites qui ont su tenir tête à l‘Histoire et ses vicissitudes. La route en lacet, qui grimpe hardiment jusqu’à l’esplanade centrale, confirme ce sentiment d’impertinence ; plus on se rapproche, plus Sancerre fait le fier.

     

    Un site antérieur à la guerre des Gaules

     

    Sancerre et son vignoble en automne, vue sur les toits des maisons, Berry (Cher)
    Situé à 300 mètres d’altitude, Sancerre domine la vallée de la Loire et 3 000 hectares de vignes installées sur des collines et coteaux.

     

    Depuis l’esplanade ombragée de tilleuls, le panorama à 360° qui se livre sans aucune retenue sur les méandres de la Loire, le port fluvial de Saint-Satur et le moutonnement des collines viticoles du Sancerrois fait soupirer d’aise le visiteur : quelle force tranquille se dégage de ces paysages ! L’esplanade s’appelle Porte César, une allusion à l’étymologie, longtemps mise en avant, de Sancerre avec le primat des Gaules : « Sacrum Caesaris », soit « César le sacré », puis « Saint César », devenu « Sancerre ». Un peu tiré par les cheveux, puisque le site est antérieur à la guerre des Gaules : un oppidum était déjà là entre 1200 et 500 av. J.-C. Quelques siècles plus tard, le lieu reçut les reliques de saint Satyrus, un martyr africain, et prit le nom de San Sayre, équivalent en ancien français du Satyrus en latin médiéval. Le cœur de ville est petit et bat entre la Nouvelle Place, autrefois place du Souvenir, métamorphosée en 1980 pour mieux accueillir boutiques d’artisans et terrasses, et la place de la Panneterie. Entre les deux, un entrelacs de ruelles tortueuses invite à la flânerie entre placettes où la vie s’écoule, épicurienne et douce, et maisons anciennes, chargées de souvenirs.

     

    La maison de Jacques Cœur

     

    Rue Saint-Jean, village de Sancerre, Berry (Cher)
    Incontournables, la rue Saint-Jean et ses vitrines, dont certaines dates du XIXe siècle.

     

    L’office de tourisme a déroulé un fil d’ariane tracé au sol en 28 points, dont les plus importants racontent Sancerre à livre ouvert. Pas de monuments remarquables, mais un patrimoine harmonieux et authentique, qui confère au village un charme bien à lui. La rue Saint-Jean conduit le promeneur jusqu’à l’église Notre-Dame, édifiée en deux temps : entre 1658 et 1660 où les travaux sont suspendus, puis après la destruction de la chapelle Saint-Jean par la chute de l’aiguille du beffroi voisin en 1725. Celui-ci, bâti un siècle plus tôt, comprenait une chapelle, une salle des échevins (les magistrats de la ville) et une salle des cloches. Depuis la construction de l’église auquel il est adossé, le beffroi est devenu son clocher. Le laïc et le religieux font ici bon ménage !

     

    Maison de Jacques Coeur dans le village de Sancerre, Berry (Cher)
    Détail de la façade de la plus ancienne demeure du village, la maison de Jacques Cœur.

     

    À l’angle de la place, la maison Jacques Cœur est la plus ancienne du village (XVe siècle) : confisquée au grand argentier de Charles VII, elle fut récupérée par son fils, maître d’hôtel de Louis XI en 1463 avant de passer à son petit-fils, négociant en étoffes. Une belle tourelle, des fenêtres à meneaux et sous l’une d’elles, le blason familial, trois cœurs rouges et trois coquilles, qui atteste de l’identité des propriétaires. En revanche, l’existence d’un souterrain sous la maison qui conduirait jusqu’au palais de Bourges est une légende ! La rue du Carroir-de-Velours (« carrefour » où on vendait des tissus) débouche sur la place du Connétable et la tour des Fiefs. Cette tour, remarquable pour son histoire, est le seul vestige des six tours et du château du XIVe siècle édifié par les comtes de Sancerre. Il est possible de grimper à son faîte pour jouir de la vue sur l’enchevêtrement des toits et évoquer l’épisode terrible qui marqua l’histoire du village: le siège de 1573 par les troupes catholiques du gouverneur du Berry, le maréchal de La Châtre.

     

    Un cochon sur les remparts 

     

    Panorama depuis le sommet de la tour des Fiefs, vue sur le château de Sancerre, Saint-Satur et la Loire (Cher)
    Du haut de la tour des Fiefs, dernier vestige du château féodal (XIVe siècle), vue sur l’hôtel particulier qui fut bâti au XIXe siècle sur ses ruines.

     

    Après les massacres de la Saint-Barthélémy en août 1572, les huguenots du Berry sont venus se réfugier dans la citadelle de Sancerre, vite encerclée par les catholiques. 7 000 hommes contre 2 500 assiégés, auxquels se sont joints les catholiques de la ville, visiblement plus attachés à leur cité qu’à leur religion. L’avantage est dans un premier temps aux protestants mais rapidement, le gouverneur décide d’affamer les Sancerrois. Il faudra quand même 5000 boulets de canon et neuf mois de siège pour venir à bout des assiégés, qui meurent littéralement de faim, au point de manger des rats, de l’herbe, des pains de paille et d’ardoise pilée... Une famille tenta même de manger les restes de son enfant mort. Pourtant, les fiers Sancerrois n’ont pas hésité à se balader des jours durant sur les remparts avec un cochon en laisse pour narguer les catholiques ! Tant de courage et de morgue se paieront très cher, les murailles furent rasées, les échevins passés au fil de l’épée. Le siège fut si épouvantable qu’il fut comparé à celui de La Rochelle.

     

    Du commerce et des vignes 

     

    Vendange, vignoble de Sancerre, Berry (Cher)
    Le sancerre est reconnu dès 1936 en AOC pour les blancs, puis en 1959 pour les vins rouges et rosés.

     

    Difficile d’imaginer des moments si sanglants en flânant dans le vieux Sancerre d’aujourd’hui. Ornées de tours à escalier, de fenêtres à meneaux, les demeures de pierre qui bordent la place de la Panneterie, comme le Logis Clément ou l’hôtel de la Thaumassière (XVIe siècle), nous parlent plutôt de douce vie provinciale, de marchés prospères et bavards, de réunions familiales autour de l’âtre. La pierre d’ici sent plus le commerce que la guerre, comme dans les ruelles pentues du quartier vigneron, autour de la rue Basse-des-Remparts, où les boutiques vendent le meilleur du vignoble. À l’angle de la place du Beffroi, le logis du seigneur d’Herry (fin XVe siècle) abrite les vins de Sancerre qui ont fait la prospérité du Sancerrois. Ici, la vigne est une religion déjà mentionnée dans les écrits de Grégoire de Tours au VIsiècle. Connu autrefois par les vacanciers de la Nationale 7 et les habitués des cafés parisiens, le sancerre compte désormais 330 vignerons répartis sur 14 communes de la rive gauche de la Loire, et deux cépages, le sauvignon pour le blanc, le pinot noir pour le rouge et le rosé. La Maison des Sancerre propose un parcours interactif, des vidéos, une découverte des terroirs et du travail des hommes, un espace sensoriel. En sortant, vous ne devriez plus rien ignorer des vins dont Henri IV disait, après les avoir découverts : « Ce vin est le meilleur que j’ai bu! Si les gens du royaume le goûtent, il n'y aura plus de guerres de Religion. »

     

    Patrimoine français - 2:  Sancerre, « village préféré des Français » 2021

     

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    L'occulte et mystérieux château du

    Plessis-Bourré

     

    Par François Silvan
     
    source : Détours en France n°170, p. 76
     
     

    Les particularités du Plessis-Bourré sont étroitement liées au caractère de son concepteur, novateur et admirateur du raffinement flamand et italien, mystique... Car il semblerait que l’homme taquinait les sciences occultes.

     

     

    Vue aérienne du château du Plessis-Bourré, en Anjou (Maine-et-Loire)

    Après avoir acheté le domaine de Plessis-le-Vent, à 20 kilomètres au nord d’AngersJean Bourré fit construire le château du Plessis-Bourré de 1468 à 1473. Entré à 19 ans au service du futur Louis XI, il en sera le ministre, fidèle parmi les fidèles. L’homme meurt à 83 ans en 1506, un âge extrêmement avancé pour l’époque. Avait-il donc découvert le secret de quelque élixir de jouvence ? Car il semblerait que l’homme taquinait les sciences occultes.

     

    Le cocktail parfait d'un château à sensations

     

    Le château du Plessis-Bourré, en Maine-et-Loire

    Découvrez un témoignage quasi intact de l’architecture castrale du XVsiècle en visitant le château du Plessis-Bourré (de février à novembre). Les extérieurs sont bien conservés, avec leurs quatre ponts-levis, dont deux fonctionnels, tout comme les salles et appartements meublés et décorés selon les usages des XVau XIXe siècles. S’ajoutent chemin de ronde, geôle, douves en eau, sans oublier d’obscurs symboles qui passent pour alchimiques disséminés sur le domaine : le cocktail parfait d’un château à sensations.

     

    Entre mystique et raffinement

     

    Douves du château de Plessis-Bourré, Maine-et-Loire

    Les murs du château en pierre de Boullay, carrière près de Saumur, ont conservé leur teinte claire. Sa cour de 1 360 m2 et l’aisance du logement annoncent, eux, la Renaissance. Vous êtes dans un château typique du « style transition » qui a gardé son aspect et son état de l’époque, ce qui est rare. Sans détailler l’intérieur, entièrement meublé par thématique (salons Louis XVI, Louis XV ou salle médiévale), sachez que vous y trouverez quelques très belles pièces, comme une cathèdre du XVe siècle. Saviez-vous que leur haut dossier avait, entre autres, la fonction de protéger la personne d’un coup de poignard dans le dos ? Ou un dressoir médiéval, meuble qui permettait de jauger l’état des finances de votre hôte en fonction de la vaisselle qui y était présentée.

     

    Codex des alchimistes

     

    Vue aérienne du château du Plessis-Bourré, en Anjou (Maine-et-Loire)

    Au sortir de l’imposante salle des festins (à trois voûtes d’ogives !), les initiés du grand œuvre reconnaîtront dans la très ouvragée serrure en forme de singe un premier symbole alchimique. Mais c’est surtout sur 16 des 24 tableaux du plafond de la salle des gardes (composé de 6 grands caissons divisés chacun en 4), que l’on retrouve, cachés, les symboles du grand œuvre comme le sel, le mercure, le soufre... La sculpture de l’athanor ou fourneau philosophique, grand alambic utilisé par les alchimistes, signale également la fonction du lieu. On ne sait si Jean Bourré pratiqua lui-même l’alchimie ou s’il s’agissait pour lui d’une forme de spiritualité dont ce plafond serait le testament. Ses images enfermeraient conseils et règles à l’attention de ses « coreligionnaires » persuadés que l’on peut « modifier la matière par l’esprit ». Pour pénétrer ces énigmes « déchiffrées » par Eugène Canseliet, spécialiste ès occultismes des années 1930, privilégiez la visite guidée ! Un jardin alchimique a par ailleurs été aménagé à l’entrée du parc. Pour la jouvence, vous essaierez l’herbe aux goutteux, le pissenlit ou l’absinthe... Vous y apprendrez aussi que basilic, primevère ou bétoine sont supposés jouer un rôle dans la recherche de l’immortalité...

     

    Un château qui aime le cinéma

     

    Peau d’Âne de Jacques Demy, Jeanne d’Arc de Pierre Badel, Le Bossu de Philippe de Broca, Fanfan la Tulipe de Gérard Krawczyk, La Princesse de Montpensier de Bertrand Tavernier... Le nombre de films tournés au château du Plessis-Bourré fait de la forteresse elle-même une star indémodable. Quel que soit notre âge, nous sommes sous le charme, et les douves et son double pont-levis font ressurgir en nous des images tumultueuses. De quoi hésiter, dans la boutique de souvenirs, entre un traité d’alchimie ou l’épée de bois de notre enfance !

     

    Patrimoine français - 2:  L'occulte et mystérieux château du Plessis-Bourré

     

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    Le causse de Gramat : 3 randonnées

    secrètes

     

    Par Sophie Denis
     
     
    source : Détours en France HS 40 balades en France 
    Publié le 14/06/2021
     

    On croit connaître le causse de Gramat, vaste bloc de calcaire : un univers minéral peuplé de genévriers odorants, de caselles de pierres sèches et de moutons aux lunettes noires. Aride, oui. Monotone, sûrement pas. Car le causse cache bien son jeu pour qui ne sait pas prendre son temps. Il recèle des rivières couleur émeraude, des grottes comme des cathédrales et même une forêt. Ces trois balades révèlent tous ses secrets.

     

     
    Rocamadour

    L'Alzou et l'Ouysse

     

    Au départ de Rocamadour, un superbe itinéraire à pied, au fil d’un canyon de toute beauté : l’occasion de découvrir que les rivières disparaissent sous terre et de croiser des plongeurs venus du monde entier. La balade démarre tôt le matin, depuis le parking au bas de Rocamadour. Facile, il suffit de suivre, dans un premier temps, le GR®6 (balisé en rouge et blanc) qui suit la vallée de l’Alzou.

     

    Le chemin s’enfile très vite entre d’imposantes falaises taillées en canyon. Il ne manque que des silhouettes d’Indiens en sentinelle pour se croire ailleurs… Un pont permet de passer sur l’autre rive, avant d’attaquer la montée jusqu’au col de Magès, à la frontière entre l’Alzou et l’Ouysse, autre vallée karstique créée à coups de méandres torturés.

     

     

    Le canyon de l'Alzou

    Capricieuse résurgence de l'Ouysse

     

    Nous descendons maintenant une petite route jusqu’au gouffre de Cabouy. Cette belle vasque entourée de végétation n’est pas alimentée par une source, mais par une résurgence. L’Ouysse, qui prend sa source dans le Ségala, vient de parcourir 25 kilomètres sous terre depuis Thémines et remonte enfin à la surface. Capricieuse, elle recommence un kilomètre plus loin, alimentée par des eaux d’infiltration.

     

     

    Résurgence de l'Ourse

    L'Ouysse n'a pas livré tous ses secrets : des galeries souterraines inexplorées

     

    Après avoir traversé une prairie, nous atteignons le gouffre de Saint- Sauveur, caché au fond d’une combe. Vision incongrue que ces eaux vert turquoise dans des paysages caussenards ! Plus étonnant, nous croisons trois Australiens équipés de lourdes bouteilles. Véritable gruyère creusé de galeries et de rivières, le causse du Quercy est sur le podium de la plongée souterraine, après la Floride et le Yucatan. Il attire des spécialistes du monde entier.

     

    Quant au gouffre de Saint-Sauveur, il en est l’Everest (inversé !) : un parcours difficile avec une première descente sur 150 mètres, jusqu’à une profondeur de 70 mètres, puis un palier de 550 mètres, avant une deuxième descente à 180 mètres. Un monde inaccessible pour le commun des mortels, qui n’a pas livré tous ses secrets puisqu’une partie de l’ Ouysse souterraine n’a encore jamais été explorée…

     

    Retour sur la terre. De l’autre côté du gouffre, un sentier grimpe sous la futaie, jusqu’à une arche de pierre calcaire creusée par l’érosion. Une grotte, fermée par une grille, protège une colonie de chauve-souris. À nos pieds, l’Ouysse décrit un méandre, couleur lagon. Splendide.

     

    En savoir plus 

    • Carte : IGN 1/25 000, « Gramat- Rocamadour », 2137 E.
    • Topoguide « Le Lot à pied », PR®11. Boucle de 8 kilomètres, départ de Cabouy ; Fédération française de Randonnée.

     

    La Braunhie

     

     

    La Braunhie

     

    Il y a forêt et forêt. En suivant la D146 qui vient du village d’Espédaillac, inutile de chercher de hautes futaies. On ne trouve que de petits bois de chênes pubescents, d’érables de Montpellier et de cornouillers, alternant avec des pelouses sèches, arpentées par des moutons. Le massif de la Braunhie en est couvert, car il est resté sauvage, peu cultivé. Il n’est pas rare d’y croiser un chevreuil en vadrouille…

     

    Rien de tel qu’une balade à pied pour nous imprégner de cet univers particulier. Elle part du parking de Planagrèze, sur la D42, en direction de Caniac-du-Causse. Un sentier balisé en jaune mène, en quelques pas, à une « igue » (gouffre). Une simple ouverture dans le sol, comme il y en a tant sur le causse. Cette igue-là recèle dans ses entrailles, à 270 mètres, une rivière aux eaux cristallines. Elle fut explorée en partie par le géographe-spéléologue Édouard-Alfred Martel, découvreur de Padirac en 1889.

     

    À proximité, se dresse un dolmen. On en compte 600 dans le Lot, la plupart à Gramat, soit une des plus fortes concentrations de France. Celui-ci date de 2 000 ans avant notre ère et servait de sépulture : le tumulus qui le recouvrait a disparu.

     

    La Braunhie

    Les lacs de Saint-Namphaise

     

    Le sentier conduit à travers des paysages typiques. Des champs entourés de murets de pierres sèches, dont certains ont conservé leur clède, une barrière en genévrier ; des dolines ou « cloups », des dépressions plus ou moins rondes nées de la dissolution de la roche calcaire et dont le sol argileux pouvait être cultivé ; une caselle, l'abri des bergers. Et ce muret percé d’une ouverture : « lou countodou » servait à faire passer les moutons un par un, pour les compter…

     

    Nous avions entendu parler de lacs sur le causse. Il y en a un devant nous. Oui, ce modeste point d’eau enchâssé dans le calcaire mérite l’appellation de « lac », dans le causse aride. Alimenté par la pluie ou une source, il a été taillé à main d’homme dans la pierre, pour abreuver les troupeaux. Nombreux sur le causse, ils portent le nom de Saint-Namphaise, un officier de Charlemagne retiré en ermite dans la forêt de la Braunhie, qui aurait creusé des lacs dans le rocher pour faire pénitence. Il est devenu le patron des bergers, reconnaissants, et son sarcophage repose à Caniac, dans la crypte de l’église Saint-Martin.

     

    En savoir plus

    • Carte : IGN 1/25 000 « Cahors- Saint-Cirq-Lapopie-Vallées du Lot et du Célé », 2138 OT.
    • Trois circuits d'intérêts (entre 5,5 et 14,5 kilomètres) sillonnent le secteur : « Fonds de la Braunhie » ; « Igue de Planagrèze » ; « La Braunhie de Saint- Namphaise ».
    • Guides disponibles sur : tourisme-labastide-murat.fr

    Le Cuzoul de Sénaillac : plongée dans les entrailles de la Terre

     

     

    Le gouffre du Cuzoul de Sénaillac

     

    À force d’entendre parler de gouffres et de grottes, c’est inévitable : on s’imagine dans la peau de Martel explorant les galeries de Padirac, et l’envie de jouer les spéléologues nous titille… C’est possible avec cette descente encadrée, accessible à tous, dans le gouffre du Cuzoul de Sénaillac, près de Labastide-Murat.

     

    Un bois de chênes pubescents comme un autre sur le causse de Gramat, un sentier qui serpente sous les feuillus. Difficile d’imaginer que l’aventure commence à quelques mètres de là : un trou dans la pierraille, caché par les broussailles, mais signalé par un panneau qui mentionne, en noir sur fond rouge, qu’on ne s’aventure là qu’à ses risques et périls. Et impérativement sous la conduite d’un spéléologue.

     

    Pour nous, il s'agit de Fabien Pinier. Notre guide distribue combinaisons et harnais, en prodiguant ses conseils. Toujours vérifier que la corde est bien attachée, laisser de l’espace avec son voisin, rester attentif. Nos casques sont équipés de lampe à acétylène, qui diffuse une lumière dorée. Ça devient sérieux !

     

     

    Au fond du gouffre de Cuzoul de Sénaillac

     

     

    La salle des Gours dans le gouffre du Cuzoul de Sénaillac

     

    « Qui veut commencer ? » La question est suivie d’un silence pesant. Nous nous lançons, car si nous attendons trop longtemps, nous allons trouver moins d’attraits à ce trou noir, profond de 18 mètres : « Il y a des bêtes au fond ? » Seulement des chauves-souris, peut-être un mouton ou un reptile, tombés par malchance… Dûment harnaché, nous commençons la descente. Malgré notre appréhension, cela se passe bien. Nous glissons le long de la corde et il suffit d’exercer une légère pression pour ralentir. Si seulement, il n’y avait pas tout ce noir en dessous, prêt à nous engloutir !

     

    Terre en vue. La réception se fait sans problème sur une butte – en réalité un cône d’éboulis, formé par la chute du sol au-dessus. Tout autour, seulement le noir. « Il y a quelqu’un ? » Il est temps d’allumer la lampe à acétylène. La corde remonte chercher nos compagnons, en direction du trou vert et bleu : au-dessus, le monde est toujours là…

     

    Nos yeux distinguent quelques formes de roches, mais pas de trace d’être vivant – ni mort, d'ailleurs. Tout le monde est arrivé. Fabien Pinier nous fait signe de le suivre, en prenant garde où nous marchons. Les roches sont rendues glissantes par l’humidité ambiante, autour de 90 %. De la buée sort des bouches et des narines. La température est de 12 °C. En file indienne, nous faisons le tour de la salle dite du Vélodrome. Un fabuleux décor de concrétions émerge du chaos noir, éclairé par le reflet cuivré des lampes. Stalactites, stalagmites et blocs de calcaire, modelés par le travail méthodique des gouttes d’eau.

     

     

    Faire l'expérience du noir absolu

     

    Surprise ! Derrière une roche, un passage étroit nous fait accéder à une deuxième salle dite des Gours, ces petits bassins formés par des dépôts de calcite. Ce tableau fantastique valait bien les quelques secondes d’appréhension avant la descente ! Fabien Pinier nous sort de notre rêverie : « Éteignez vos lampes ! » L’obscurité est totale, même quand on passe la main devant les yeux. Nous faisons l’expérience unique, quasi angoissante, du noir absolu.

     

    C’est l’heure de remonter. Les cordes sont toujours là, vision rassurante. Le retour est plus sportif. Il faut se tracter soi-même, aidé par une corde qui relie un pied et une main. L’effort est réel, mais pas surhumain. Au-dessus, le bleu reprend ses droits. Bizarrement, en regardant une dernière fois en bas, on en vient à regretter le noir…

     

    En savoir plus 

    • Kalapca Loisirs : Conduché, 46330 Bouziès. 05 65 24 21 01. kalapca.com Tarif : 28 € la découverte de spéléologie.
    • Offices de tourisme Coeur-de-Causse : 9 place de la Mairie, Labastide-Murat. 05 65 21 11 39. tourisme-labastide-murat.fr Gramat : Bourg. 05 65 33 22 00. vallee-dordogne.com
    • Parc naturel régional des Causses du Quercy : 11 rue Traversière, 46240 Labastide-Murat. 05 65 24 20 50. parc-causses-du-quercy.fr

     

    Patrimoine français - 2:  Le causse de Gramat : 3 randonnées secrètes

     

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    Vosges : sur la route des châteaux

    forts d'Alsace

     

    Par Florence Donnarel
     
     
    source : Détours en France HS 40 balades en France 
     
    Publié le 10/06/2021
     

    De la houle forestière qui submerge le nord du massif des Vosges surgissent des châteaux en ruine, amarrés pour l’éternité à des pitons de grès rose. Depuis les villages de la vallée du Steinbach, nous avons marché vers ces sentinelles de pierres, observé le travail des forestiers et cueilli des morceaux de l’Histoire alsacienne.

     

     

    Le rocher Wachtfels

    Le rocher de Wachtfels qui domine le village d'Obersteinbach.

     

    Nous sommes à la sortie du village de Niedersteinbach et la forêt est partout autour de nous : des hêtres aux troncs lisses, des chênes aux feuillages dentelés, des pins sylvestres aux nuances bleutées, des épicéas à l’ample ramure…

     

     

    L'Alsace médiévale, une mosaïque de seigneuries

     

    rocher du Wachstfels, Obersteinbach
     
     

    Depuis Niedersteinbach, nous avons choisi de nous élever vers les rochers de grès rose qui percent à travers la forêt et se voient parfois couronnés des vestiges d’un château médiéval. Nous commençons notre marche devant l’église catholique Saint-Gall (XVIIIe siècle). Dans ses combles, se cache la plus importante colonie de grands murins d’Alsace : 1 000 spécimens femelles. Les visiteurs peuvent observer les chauves-souris devant la mairie, par écran interposé, alors qu’une caméra infrarouge les filme dans l’édifice. Le sentier longe le Steinbach vers le village en amont. 

     

     

    Obersteinbach
     
     
    Le village d'Obersteinbach.

     

    Très vite, les premières maisons d’Obersteinbach apparaissent. « On reconnaît les plus anciennes à leur base en grès et à leur partie supérieure en pans de bois », nous explique Noémie Thomas, en charge d’un plan de paysage autour du GR®53, entre Saverne et Wissembourg, pour le Parc naturel régional. « Le Club Vosgien a créé, en 1897, un sentier de grande randonnée de 430 kilomètres entre Belfort et Wissembourg, patiemment entretenu. Sa partie Nord, au-delà du Donon, correspond au GR®53.  » L’entretien des points de vue est essentiel. Depuis la maison forestière d’Obersteinbach, nous marchons vers l’un d’eux, en direction du sud. Le sentier plonge vite dans la hêtraie tapissée de feuilles mortes qui craquent sous nos pas.

     

    Les ruines de Wittschloessel
     
     

    Un ronronnement de tronçonneuses accompagne la fin de notre marche vers les ruines de Wittschloessel, 200 mètres plus haut. Un panneau interdit l’accès aux promeneurs, alors que se déroule un chantier d’abattage signalé par le fracas de grands arbres bruns et dénudés s’écrasant au sol. « Nous sécurisons le sentier en coupant des épicéas malades, atteints par des scolytes et susceptibles de tomber ou de propager l’affection », expliquent les bûcherons, mobilisés depuis plus de deux ans contre les coléoptères qui attaquent les résineux fragilisés par la sécheresse. À 444 mètres d’altitude, le fortin de Wittschloessel, dont il ne reste rien, devait être un poste d’observation des châteaux voisins. Au nord, les arbres fraîchement coupés ouvrent la vue sur Obersteinbach et ses forêts, d’où surgissent les squelettes de pierre du Petit Arnsbourg et du Wasigenstein.

     

     

    randonneur sur GR53
     
     

    Les châteaux du Petit Arnsbourg et du Wasigenstein

     

    Un sentier forestier nous ramène vers le village d’Obersteinbach pour reprendre le GR®53 en direction du nord et des châteaux entrevus. Le village-rue se délecte d’un panorama sur trois affleurements rocheux qui émergent parmi les arbres. Sur l’un d’eux, comme une ruine miniature des châteaux que nous allons découvrir, le Petit Arnsbourg et son morceau de tour. « L’Alsace médiévale est une mosaïque de seigneuries avec, à leurs têtes, des princes, des évêques ou des chevaliers qui règnent depuis leurs châteaux. Ces derniers fonctionnent comme des centres économiques et gèrent les espaces agricoles et les forêts environnantes », éclaire Mathias Heissler, architecte du Patrimoine au conseil départemental du Bas-Rhin et guide érudit de notre randonnée.

     

    Le château de Wasigenstein
     
     

    Depuis le village, nous atteignons le château du Wasigenstein après une trentaine de minutes de marche dans le sous-bois. À notre grande surprise, nous débouchons dans un large fossé taillé dans la roche. Sur l’une des extrémités, des restes de constructions en grès rose s’appuient sur le socle en pierre pour s’élever vers le ciel. « Voici l’exemple type du château-rocher. Les bâtisseurs ont choisi un éperon rocheux. Ils l’ont coupé en deux et creusé pour disposer d’un fossé dissuasif, dans lequel prendra souvent place la basse-cour. Sur la paroi mise au jour, des canalisations sont taillées pour recueillir l’eau et l’apporter vers une citerne », explique-t-il en effleurant la pierre. Le château s’échelonne sur une soixantaine de mètres depuis la base du rocher. Un escalier métallique redonne accès aux parties supérieures, avec des pièces troglodytiques qui devaient servir à stocker les récoltes et les impôts en nature. La plateforme sommitale, elle, abritait le logis seigneurial.Côté montagne, un pan encore debout ressemble à un écorché du bastion. À l’opposé, en direction de la vallée, le début d’une tour massive apparaît par-delà un garde-corps.

     

    Un château jumeau s’élève sur le rocher voisin. « Il était destiné à une branche de la famille Wasigenstein. La question de la copropriété s’est vite posée pour ces châteaux habités, pour les plus anciens, pendant des centaines d’années. Ils furent abandonnés au XVIe siècle, quand les seigneurs sont partis vivre dans leurs résidences urbaines. La forêt se referma alors sur les ruines… »

     

     

    Le château-rocher de Froensbourg

     

     Le chateau-rocher de Froensbourg

     

    Nous reprenons notre marche à travers la futaie, songeant à cet ogre végétal qui disloque les constructions et menace, avec le jeu du gel et du dégel, ces vaisseaux de pierre. Dans le vallon suivant, après une heure et demie de randonnée, nous retrouvons, dans le château de Froensbourg, les principes d’architecture du château-rocher avec deux parties autonomes qui percent la forêt.

     

     

    Le chateau-rocher de Froensbourg
     
     

    Et toujours la relique du donjon. « À la fin du XVIIe siècle, les troupes de Louis XIV détruisent les châteaux d’Alsace à l’explosif pour les empêcher de devenir des bastions de rébellion, alors que la région est intégrée à la France. De nombreuses ruines comportent un pan de donjon ou de mur-bouclier. Je suis convaincu qu’il s’agit d’un acte volontaire pour laisser une trace de la destruction et affirmer la puissance royale », confie Mathias Heissler. À Froensbourg, d’après les empreintes de la charpente dans la roche, neuf ou dix niveaux devaient s’étager sur le socle de pierre, dans une sorte de rue verticale.

     

     

    Le château de Fleckenstein, en équilibre

    au-dessus du vide

     

    Le château de Fleckenstein
     
     

    Le plus impressionnant des châteaux nous attend plus à l’est, après une bonne heure de marche rythmée par le balancement grinçant des grands pins. « Pour le Fleckenstein, un château de sommet, nous disposons d’un témoignage rare : une aquarelle, copie d’une tapisserie, qui le représente en 1562 », s’enthousiasme Mathias Heissler. Visible à l’accueil du château, aménagé pour recevoir des visiteurs, l’image montre un village perché et ceinturé de murailles avec une chapelle, des maisons à colombages et deux hautes tours protégeant le puits et un des escaliers.

     

    Le château de Fleckenstein
     
     

    De nos jours, les ruines de la forteresse inspirent le respect. On admire l’ingéniosité des tours – le puits servait aussi de montecharge –, l’escalier troglodytique et la plateforme sommitale, longue de 90 mètres et dominant la forêt. Là-haut, en équilibre au-dessus du vide, un pan de façade avec une fenêtre à coussiège invite à la rêverie.

    Carte : IGN 1/25 000, « Haguenau-Lembach- PNR des Vosges du Nord », 3814 ET.

     

    Patrimoine français - 2:  Vosges : sur la route des châteaux forts d'Alsace

     

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    Puisaye : le bocage Bourguignon

     

     

    Par Hughes Derouard
     
    source : Détours en France n°187
     
     
     

    La Puisaye, bocage bourguignon, est l'un des secrets les mieux gardés de Bourgogne. Cette région naturelle composée de bois, de prairies gorgées d’eau, d'étangs, de haies est à mille lieux des routes viticoles. À cheval entre Yonne et Nièvre, La Puisaye, chère à Colette doit une partie de sa richesse à son sous-sol qui en a fait un haut lieu de la tradition potière.

     

     

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    À cheval entre Yonne et Nièvre, la Puisaye,  le nom vient de pays humide, est l’un des territoires nuturels les plus secrets de Bourgogne – même si le grand chantier de Guédelon, de renommée internationale, l’a fait sortir de son relatif anonymat.

    Le paysage poyaudin, un pays de bocage 

     

    Le paysage poyaudin ? Ici, pas de rangées de vignes ni de demeures exubérantes coiffées de toits de tuiles vernissées, mais une grasse campagne quadrillée de haies, de champs, d’étangs, de bois. « La singularité surtout, c’est que c’est un pays de bocage et qu’on y retrouve une mentalité de pays de bocage. C’est une région très cloisonnée, avec ses haies, son habitat dispersé »,explique Marcel Poulet, peintre installé à Merry-la-Vallée, dans sa Puisaye natale. Sorciers, jeteurs de  sorts, guérisseurs, « Dame Blanche » vue dans les brumes flottant au-dessus des prairies… Pendant longtemps, il y a eu ici des pratiques étranges, des croyances et des superstitions tenaces. C’est un territoire plus silencieux, plus mystérieux que le reste de la Bourgogne

     

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    Le lac artificiel du Bourdon, près de Saint-Sauveur-en-Puisaye, a été mis en eau en 1901 pour alimenter le canal de Briare.
     
     

    Petits villages de charme 

     

    Cette région rurale se découvre, sans balisage, ni GPS, au hasard de ses chemins creux, de ses petites routes départementales tortueuses. Au fil d’une balade buissonnière, vous tomberez sur des petits villages aux toits de tuiles brunes et au patrimoine très riche. Ici, à Saints-en-Puisaye, un moulin à eau, un beau lavoir… Puis loin, un château fort du XIIe siècle, de style philippien (caractérisé par un logis seigneurial adossé à une courtine qui remplace le donjon), domine majestueusement Druyes-les-Belles-Fontaines, 300 habitants, un temps fief des comtes d’Auxerre et de Nevers. Au cœur du charmant village de Treigny, quelques kilomètres plus loin, se dresse une église de style gothique flamboyant si haute, si majestueuse, qu’elle est devenue, dans le langage collectif, la « cathédrale de Puisaye ». Et puis, dans une dizaine d’autres villages, se découvrent de petites chapelles ou églises qui abritent des peintures murales insoupçonnées, chefs-d’œuvre de l’art roman exécutés avec de l’ocre locale.

     

     

    Michel Guyot : le saveur de Saint-Fargeau

     

    La Puisaye est une destination de choix pour assister au spectacle historique au château de Saint-Fargeau racheté par Michel GuyotCet amoureux des arts et des forteresses (il est à l’origine du chantier de Guédelon) et natif de Bourges a repris avec son frère Jacques à la toute fin des années 1970 ce monument emblématique de la Puisaye, alors en très mauvais état. Aidé de nombreux bénévoles il l’ouvre à la visite et y crée un grand spectacle historique qui attire les foules – 600 acteurs, 60 cavaliers. Aujourd’hui, le « Versailles poyaudin » a retrouvé tout son lustre, avec ses hauts murs de brique rose et ses puissantes tours qui dominent la ville.

     

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    Au printemps, les sous-bois de feuilles près de Moutiers-en-Puisaye.

    La Puisaye au printemps

     

    La Puisaye s’arpente de préférence au printemps lorsque la végétation explose. « C’est dans ces moments-là qu’elle révèle toute sa sensualité », vante un randonneur habitué des lieux. C’est dans ces moments-là aussi que l’écrivain Colette, née à Saint-Sauveur-en-Puisaye en 1873, fera l’apprentissage des joies de la nature : « J’avais, petite, le loisir de suivre, en courant presque, le grand pas des garçons, lancés dans les bois à la poursuite du Grand Sylvain, du Flambé, du Mars farouche, ou chassant la couleuvre, ou bottelant la haute digitale de juillet au fond des bois clairsemés, rougis de flaques de bruyères… Mais je suivais silencieuse, et je glanais la mûre, la merise, ou la fleur, je battais les taillis et les prés gorgés d’eau en chien indépendant qui ne rend pas de comptes… »

     

     

    Saint-Saveur cultive l'esprit Colette

     

    « C’est un village et pas une ville ; les rues, grâce au ciel, ne sont pas pavées ; les averses y roulent en petits torrents, secs au bout de deux heures ; c’est un village, pas très joli même, et que pourtant j’adore. » L’écrivaine est née ici en 1873 et y a vécut jusqu’à ses dix-sept ans, la famille fuyant alors l’étroitesse d’esprit des villageois. Colette, jadis méprisée en Puisaye, occupe depuis 1995 la plus belle bâtisse du bourg : le château de Saint-Sauveur abrite aujourd’hui un musée dédié à sa vie et son œuvre. Sa maison d’enfance, acquise par la Société  des amis de Colette, dans la rue Colette, est en cours de restauration. « C’est dans ce jardin, dans cette maison, dont elle fera un personnage de roman à part entière, que va germer le grand écrivain qu’elle deviendra. »

     

     

    La céramique, un trésor de la Puisaye

     

    Le trésor de la Puisaye, c’est d’abord son sous-sol, argileux, imperméable, cette terre souple à modeler, exploitée depuis le XIVe siècle dans la céramique. Partout, en arrivant de Saint-Amand-en-Puisaye (Nièvre) des boutiques et ateliers évoquent cet artisanat. De véritables artistes perpétuent d’ailleurs cette tradition, comme au château de Ratilly, « centre d’art vivant », à Treigny, dans l’Yonne. Jeanne et Norbert Pierlot ont fait revivre ici, dans les années 1950, ce château philippien à l’abandon et ont participé au renouveau de la production de grès dans la région. Leur fille Nathalie y poursuit aujourd’hui avec talent et discrétion la fabrication du fameux « grès de Ratilly ». Et puis, il y a l’historique poterie  de la Bâtisse, à Moutiers-en-Puisaye, dont l’origine remonte au XIIIe siècle et qui a gardé un four couché du XVIIIe siècle. Des générations de potiers s’y sont succédé. « Cette terre argileuse a fait la renommée de la Puisaye. Aujourd’hui encore, notre sous-sol est recherché », vante Louis-Éric Solano,  « 53e potier de la même lignée », propriétaire de la poterie de la Bâtisse. 

     

    Patrimoine français - 2:  Puisaye : le bocage Bourguignon

     

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