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Nature en images 3...Les étangs de la Brenne : l'invention d'un paysage
Les étangs de la Brenne : l'invention d'un paysage
source : Hors série - France sauvagePublié le 24/08/2015En tant que région, la Brenne est peu connue. Elle est pourtant bien visible sur la carte de France : c’est cette multitude d’étangs qui apparaît entre Châteauroux et Poitiers. Entre les vallées de la Creuse et de l’Indre, la Brenne étale plus de deux mille étangs, entre lesquels courent landes, bois et forêts. Un prodigieux milieu naturel où prolifèrent des espèces animales et végétales rares.
Le parc naturel régional de la Brenne compte officiellement 2 230 étangs, tous artificiels. Les brandes (attention aux tiques !), forêts, roselières bruissent de plus de 270 espèces d’oiseaux, de hardes de cerfs et de biches, de batraciens, de reptiles (dont la rare tortue palustre, cistude) et d’amphibiens.
Dans ces étangs vit la cistude, une petite tortue d’eau douce que l’on peut observer lorsqu’elle sort de l’eau et se perche sur une roche ou une branche, pour s’exposer au soleil. Elle est devenue un symbole de la Brenne.
Mais imagine-t-on que cette région a été façonnée par l’homme ? Dès le VIIe siècle, en effet, les moines des abbayes de Saint-Cyran et de Méobecq trouvèrent un moyen d’exploiter ces lieux où l’agriculture était impossible puisque le sol était trop humide en hiver, et desséché dès les beaux jours. Ils drainèrent toute l’eau vers des bassins qui devinrent autant d’étangs. Et ces étangs, ils les empoissonnèrent. Une richesse, avec l’obligation catholique de faire « chère maigre » le vendredi, d’autant plus qu’on se trouve ici loin de la mer !
L’exploration de ce pays long de 25 kilomètres pour une vingtaine de large, n’est pas facile. Sauf si on vous y conduit, il est quasi impossible de trouver les accès à la plupart des étangs qui, de toute façon, sont privés : leurs propriétaires, à la suite des moines du Moyen Âge, y pratiquent la pisciculture et se gardent bien des braconniers. À l’automne, les étangs sont vidés grâce à un système de vannes. Auparavant, un vaste filet a été tendu pour récupérer carpes, tanches, brochets et gardons. Cette méthode de pêche ancestrale est toujours l’occasion d’une fête.
Vous pourriez donc rouler des kilomètres et des kilomètres sur des petites routes désertes, en quête de paysages qui sans cesse vous échappent. Et quand vous traversez des hameaux, vous sentez bien qu’ils regorgent de secrets. C’est vrai que votre curiosité est partout attisée. Voyez sur la carte cet étang de la mer Rouge ! L’explication est simple : il fut ainsi baptisé par un seigneur qui, à son retour de croisade, ne parvenait pas à se déprendre d’une certaine nostalgie de l’Orient !
Plusieurs étangs sont spécialement destinés à l’accueil des amateurs de nature ; le parc naturel régional de la Brenne a aménagé des points d’observation, comme vous le découvrirez en visitant la maison du Parc à Rosnay (lieu-dit Le Bouchet). Le site le plus intéressant est la réserve de Chérine, située au sud-ouest de Saint-Michel-en-Brenne, accessible par la D 44. Il faut y venir de préférence entre avril et juillet, époque durant laquelle le plus grand nombre d’espèces différentes sont réunies. En revanche, c’est en automne que les couleurs du paysage sont les plus flatteuses, et l’ambiance la plus prenante. Vous avez toutes les chances d’y observer le busard des roseaux, le butor étoilé, le héron, la sarcelle. Mais pour la cistude, dite aussi tortue de Brenne, mieux vaut s’inscrire à une sortie nature avec un animateur.
La Marine dans le marais
Qu’est-ce donc que cette forêt d’antennes géantes, entourées de plusieurs barrières de barbelés électrifiés, près de Rosnay ? Elles appartiennent à… la Marine nationale et servent à assurer les communications radio entre l’état-major et les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la force de dissuasion, ces monstres dont personne ne sait dans quels grands fonds de la planète ils patrouillent. Mais pourquoi la Brenne ? Parce que son sol, gorgé d’humidité, est particulièrement propice à une bonne propagation des ondes radio.