• L’Éthiopienne qui a l’audace aux pieds

    L’Éthiopienne qui a l’audace aux pieds

     

    L’Éthiopienne qui a l’audace aux pieds

    Photo: Antonio Foriente

     

    Bethlehem Tilahun Alemu a conquis les fashionistas écolos avec ses souliers faits de pneus recyclés.

     

    10 sept. 2013 Par Aimie Eliot de la revue Chatelaine

     

    Le magazine économique américain Forbes l’a inscrite sur sa liste des Africaines qui ont le mieux réussi (Africa’s most successful women). Depuis, Bethlehem Tilahun Alemu, fondatrice de la marque de chaussures soleRebels, ne cesse d’être courtisée. Par la presse internationale surtout, intriguée par cette femme énergique qui, du haut de ses 33 ans, a rendu les fashionistas du monde entier avec ses souliers fabriqués avec des pneus recyclés.

     

    Elle brosse rapidement son histoire, celle d’une jeune comptable sans emploi de la banlieue d’Addis-Abeba, en Éthiopie, qui décide à 25 ans de créer son entreprise. Pas question de perdre son temps à ressasser le passé devant le micro des journalistes. D’un optimisme désarmant, Bethlehem préfère parler de l’avenir ambitieux de soleRebels, un solide bébé de 2,5 millions de dollars, 300 employés, qu’elle voudrait voir peser quatre fois plus d’ici 2016 : « Je suis une mère qui ne souhaite qu’une chose pour son enfant : qu’il grandisse ! » sourit-elle, droite dans ses ballerines (des soleRebels, bien entendu).

     

    Son succès exhale un parfum de revanche, comme une bataille gagnée contre tous les clichés qui collent aux semelles de l’Éthiopie. « Affamés, dépendants de l’aide internationale et incapables d’innovation, voilà l’image qu’on a de nous ! » s’indigne Bethlehem, le poing serré. « Mais nous avons du talent à revendre ! Pour s’en sortir, les gens d’ici développent une inventivité et un savoir-faire extraordinaires. » Leur talent pour la récupération est la principale source d’inspiration de la jeune femme. « Beaucoup d’Éthiopiens triment tous les jours très dur pour presque rien. J’aimerais voir ces conditions changer, je voudrais que les gens reçoivent un juste salaire, qu’ils puissent choisir leur vie. Ce sont eux qui me motivent, me donnent l’énergie de persévérer, de continuer à travailler dur moi aussi. »

     

    « La volonté de travailler ne suffit pas. Chez soleRebels, nous accordons une grande importance à la formation. Pas question de caser une personne dans une même tâche pendant 10 ans. Nous voulons que nos employés prennent conscience de leurs talents et en tirent parti. C’est ainsi que les choses pourront s’améliorer, qu’on fera vraiment du commerce équitable. Je me réjouis quand je vois un employé acheter une maison, une voiture, aller à l’école, faire des études supérieures. La possibilité de s’épanouir, d’accroître son autonomie, c’est la clé, individuellement et collectivement. »

     

    Avec 90 % de sa production qui s’envole pour les États-Unis, l’Europe ou l’Asie, Bethlehem est aujourd’hui à la tête de l’une des rares entreprises du pays qui exportent massivement du made in Ethiopia. L’une des rares, aussi, à être dirigées par une femme. Bethlehem s’offusque toutefois qu’on y prête attention : « Je ne me considère pas comme une “femme chef d’entreprise”. Je me considère comme une personne qui a envie de réaliser quelque chose. »

     

    Le prochain défi, pour les Éthiopiennes, c’est de croire en leurs capacités, poursuit Bethlehem. Elles contribuent au développement économique du pays et gèrent de nombreux petits commerces : elles doivent maintenant se convaincre qu’elles ont le pouvoir de réaliser de grandes choses. « Toutes veulent devenir quelqu’un. Si elles ont foi en ce qu’elles font, si elles se donnent des objectifs, elles vont réussir à bâtir des entreprises solides. Regardez l’histoire de l’Éthiopie, vous verrez que plusieurs femmes très fortes ont dirigé différentes parties du pays. Alors, je crois qu’il y a de l’espoir. À nous de jouer ! »

     

    Vous avez dit « Rebel » ?

     

    On peut acheter les chaussures soleRebels en ligne.

     

    L’Éthiopie en quelques chiffres

     

    85  millions d’habitants (2e pays le plus peuplé d’Afrique)

     

    L’Éthiopienne moyenne…

     

    se marie à 21 ans

    a 4 enfants

    vit 62 ans

    44 %  Population de moins de 15 ans

     

    Alphabétisation

    Population de 15 ans et plus qui sait lire et écrire : 35 % des femmes / 50 % des hommes

     

    Emploi

    Femmes sur le marché du travail : 81 %

    Postes de direction et en politique occupés par des femmes : 16 %

    Salaire annuel d’une Éthiopienne (66 % du salaire de l’homme):  894 $US

     

    (Sources : CIA, Unicef, ONU Femmes, Banque mondiale, rapport sur l’écart entre les sexes publié en 2012 par le Forum économique mondial)

     

     

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