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Par Frawsy le 4 Juillet 2016 à 11:05
En proie à la sécheresse, l'Amazonie
est très menacée par les incendies
Mauvaise nouvelle pour l’Amazonie : un programme prévisionnel des incendies considère que suite à la faible saison des pluies qui vient de s’achever, les conditions y sont propices à un important développement d’incendies. À l’heure actuelle, les feux recensés sont déjà plus nombreux que lors des mémorables sécheresses de 2005 et 2010.
Incendies dans la région du Mato Grosso au Brésil, photographiés le 19 août 2014 depuis la Station spatiale internationale (ISS). © Nasa
« Le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ? »interrogeait le météorologue Edward Lorenz en 1972. En effet, les multiples interactions dans notre biosphère font, par exemple, qu’un phénomène naturel récurrent localisé dans l’océan Pacifique, comme le fameux El Niño, peut avoir des conséquences désastreuses à des milliers de kilomètres de là, voire à l’échelle globale.
L’épisode de cet hiver 2015-2016, l’un des plus puissants jamais enregistré, avec celui de 1997-1998, a malheureusement des effets sur le long terme qui sont à l’origine de nombreux désordres présents et à venir. Ainsi, « l’enfant terrible » n’est sans doute pas étranger aux vagues de chaleur qui frappent ces dernières semaines le sud-ouest des États-Unis (plus de 50 °C à certains endroits et 180 km2 de forêt qui viennent de partir en fumée au nord de Los Angeles) ni à la disparité des pluies en Amérique du Sud ou, plus loin encore, en Afrique où 60 millions de personnes devraient être touchées par El Niño, selon l’Onu…
Les données sur les réserves d’eau souterraine collectées avec le satellite Grace montrent un déficit très important en 2016 pour la moitié nord de l’Amérique du Sud. L’impact sur la forêt amazonienne et tout le bassin du fleuve Amazone risque d’être très fort. © Yang Chen, University of California, IrvineEn Amazonie, la dernière saison des pluies fut... sèche
En Amazonie, l’une des régions les plus humides du Globe, le programme Amazon fire forecast (« prévision des incendies en Amazonie »), initié en 2011 par des chercheurs de l’université de Californie et du GSFC (Goddard Space Flight Center) de la Nasa, étudie en particulier les liens entre le réchauffement des eaux océaniques et les feux de forêt pour construire des modèles. Aujourd'hui, il tire la sonnette d’alarme.
La saison des pluies, de décembre à juin, fut en effet en deçà des niveaux moyens. El Niño conjugué à des eaux plus chaudes en surface dans l’océan Atlantique ont eu tous deux pour effet de décaler les pluies abondantes sur des régions plus au sud du bassin amazonien (voir cartes ci-dessus).
En conséquence : « Les conditions de sécheresse sévère au début de la saison sèche [juin à octobre,NDLR] ont préparé le terrain pour le risque extrême d’incendie en 2016 à travers le sud de l’Amazonie » s’inquiète l’un des membres de l’organisation, Doug Morton. Pour les chercheurs, qui s’appuient sur les données des réserves d’eau souterraine recueillies par le satellite Grace (Gravity Recovery and Climate Experiment), la situation est encore plus préoccupante qu’en 2005 et 2010, deux années déjà marquées par des sécheresses exceptionnelles et des incendies qui ont ravagé de grandes portions de la forêt équatoriale.
Indicateurs des risques les plus probables d’incendies dans plusieurs régions d’Amérique du Sud. Six concernent le Brésil (les états Acre, Amazonas, Maranhao, Mato Grosso, Para et Rondonia), trois en Bolivie (El Beni, Pando et Santa Cruz), et un pays tout entier : le Pérou. © Yang Chen, University of California, IrvineLes incendies sont déjà plus nombreux
Un site Internet engrange les données de l’instrument Modis du satellite Terra détectant les foyersactifs, ainsi que celles de la Global Fire Emissions Database (GFED). Il permet aujourd'hui de suivre quasiment en temps réel l’évolution des incendies. Jusqu’à présent, l’équipe a des raisons d’être pessimiste car en ce début de saison sèche, les feux sont déjà plus nombreux que lors des épisodes précédents.
« Quand les arbres ont moins d’humidité au début de la saison sèche, ils deviennent plus vulnérables au feu, et évaporent moins d’eau dans l’atmosphère. Cela stresse des millions d’arbres et cette baisse d’humidité dans toute la région permet aux incendies de grossir plus encore qu’ils ne le feraient normalement » explique Jim Randerson, qui avec son collègue Yang Chen de l’UC-Irvine, a développé ce modèle de prévisions.
Il y a de grands risques que les petits feux dans des parcelles agricoles débordent et dévorent la forêt environnante, précisent-ils. Les arbres de ce biotope, en effet, ne sont pas adaptés à ce type d’événement et, de ce fait, même un incendie très lent peut être très destructeur pour la forêt.
Enfin, autre conséquence, non moins grave, de ces incendies volontaires (pour l'agriculture) ou non, est une très mauvaise qualité de l’air pour tous les êtres vivants de la région. L’épaisse fumée peut en outre s’étendre vers le sud et l’est du Brésil et menacer les grandes métropoles São Paulo et Riode Janeiro… Un cocktail nuisible, avec la pollution, pour les personnes fragiles des voies respiratoires et des poumons.
En dehors de l’Amazonie, les chercheurs ont, avec leur modèle, identifié, trois à six mois à l’avance, neuf autres régions dans le monde susceptibles d’être en proie à des cycles d’incendies corrélés à des sécheresses inhabituelles. Ils estiment leurs prédictions opérationnelles pour une grande partie de l’Amérique centrale et de nombreux pays en Asie du Sud-Est.
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Par Frawsy le 24 Juin 2016 à 11:02
La nouvelle centrale électrique de
Bouchain combine gaz naturel et vapeur
La nouvelle centrale électrique de Bouchain, dans le département du Nord, bientôt mise en service, atteindra 575 MW. Elle fonctionne selon un cycle combiné, avec deux turbines, et s’appuie sur une toute nouvelle technologie, qui assure à la fois des émissions faibles et un démarrage rapide.
Dans une centrale électrique à cycle combiné, de l’énergie est produite deux fois. Dans celle de Bouchain (Nord), une turbine à gaz, avec combustion donc, fait tourner un alternateur qui génère de l’électricité. Mais la chaîne ne s’arrête pas là. La fumée qui en sort, encore chaude, est reprise dans un échangeur de chaleur, qui transforme de l’eau en vapeur, laquelle fait tourner une seconde turbine entraînant elle aussi l’alternateur.
Ce procédé (CCG, pour cycle combiné au gaz naturel) est connu depuis plusieurs décennies (EDF gère trois autres sites de ce type en France) mais la nouvelle centrale de Bouchain, qui remplace une installation à charbon, est d’une nouvelle génération. Elle exploite une technologie mise au point avec General Motors et baptisée Flexi Efficiency 50, qui concerne l’ensemble de la chaîne, turbine à gaz, turbine à vapeur, alternateur, échangeur et système de commande.
La centrale de Bouchain sera mise en service cette année. Elle utilise une turbine au gaz naturel, ajointe à une turbine à vapeur, et vient remplacer une centrale à charbon. © EDF, YouTubeUne centrale souple et peu polluante
Le niveau de performances est inédit :
- montée en puissance très rapide, de 50 MW par minute (deux fois plus que les centrales habituelles), avec un démarrage à chaud qui ne demande que 28 minutes, ce qui permet à la centrale de suivre les fluctuations de la demande ;
- rendement de 61 %, contre 58 % pour un CCG classique et 37 % pour une centrale à charbon ;
- 10 % d’émission de CO2 en moins par rapport à un CCG classique, soit 55 % de moins qu’une centrale à charbon ;
- émissions d’oxydes d’azote (NOx) de 50 mg/Nm3, soit 20 fois moins qu’une centrale à charbon ;
- 20 fois moins de SO2 qu’une centrale à charbon ;
- maintien des émissions garanti durant le ralentissement de la production jusqu’à 40 % de charge ;
- la centrale à gaz (modèle 9HA) est la plus puissante du monde.
Avec sa production de 575 MW, la nouvelle centrale produit l’équivalent de la consommation de 680.000 foyers mais, dans un réseau, ce n’est pas ainsi que l’on compte. D’une manière générale, les centrales « à flamme » viennent en complément du nucléaire et de l’hydraulique pour répondre à la demande fluctuante au cours de la journée et durant les périodes de pointe.
La nouvelle centrale de Bouchain abrite la turbine à gaz 9HA, la plus puissante du monde. Une seconde turbine, à vapeur, récupère de l'énergie des gaz chauds qui s'en échappent. Résultat : un rendement exceptionnel et des émissions très faibles de CO2, NOx et SO2. © EDF
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Par Frawsy le 20 Juin 2016 à 10:27
Le premier mammifère disparu à cause
du changement climatique
Un petit rongeur qui vivait sur une île au large de l'Australie serait le premier mammifère victime du changement climatique : Melomys rubicola semble avoir disparu de son île de Bramble Cay. L’animal a été vu pour la dernière fois en 2009 par un pêcheur.
Ce melomys du détroit de Torrès ressemble à l’espèce disparue. © Rebecca Diete et Luke Leung.
Bramble Cay est une toute petite île de seulement 4 hectares située à l’est du détroit de Torrès, entre le Queensland en Australie (à 227 km) et la Papouasie-Nouvelle-Guinée (à 53 km). L’île est couverte de sable, de guano compacté, et, à une extrémité, comporte une plateforme de roche phosphatique avec une végétation herbacée. Bramble Cay, qui culmine à 3 mètres au-dessus du niveau de la mer, est également visitée par les tortues vertes Chelonia mydas et des oiseaux de mer.
L’espèce Melomys rubicola n’est connue que sur cette petite île. Ces petits mammifères y ont été vus pour la première fois en 1845 par des européens qui naviguaient à bord du HMS Bramble, avec le lieutenant Yule. L’espèce de rongeurs était alors abondante et les marins leur tiraient dessus avec des arcs et des flèches.
En 1978, la population comptait encore plusieurs centaines d’individus, puis en 1998, elle a été estimée à 93 grâce à la capture de 42 animaux. Des études similaires menées en 2002 et 2004 n’ont permis de capturer que 10 et 12 individus, ce qui indiquait un déclin de la population. Or depuis 1998 la partie de l’île qui se trouve au-dessus du niveau de la marée haute est passée de 4 à 2,5 hectares et la végétation a beaucoup diminué : les rongeurs ont perdu 97 % de leur habitat.
En mars 2014, une petite étude n’avait pas permis de détecter le mammifère sur l’île. Les scientifiques de l’université du Queensland ont donc mené une expédition plus poussée entre le 29 août et le 5 septembre 2014 pour savoir s’il y avait toujours des melomys sur l’île. Les scientifiques ont choisi cette période car les tortues, qui peuvent endommager les pièges, sont absentes.
L’île de Bramble Cay est victime de l’élévation du niveau de la mer. © Natalie WallerAucune trace du rongeur sur l’île de Bramble Cay
L’enquête qui a impliqué 60 caméras de nuit et deux heures de recherches intenses de jour n’a permis d’obtenir aucun enregistrement de l’animal : la seule population connue de cette espèce est donc vraisemblablement éteinte. Les melomys de Bramble Cay représentaient la seule espèce de mammifère endémique à la Grande Barrière. Ce serait le premier mammifère à s’être éteint à cause du changement climatique causé par l’Homme.
Pour les chercheurs, la raison de cette disparition tient probablement à l’inondation des zones de basse altitude, entraînant une perte d’habitat et la mortalité de l’espèce ; dans leur rapport, ils écrivent : « Pour les îles basses comme Bramble Cay, les effets destructeurs des niveaux d'eau extrêmes résultant de phénomènes météorologiques sévères sont aggravés par les effets de l’élévation du niveau de la mer entraînée par les changements climatiques anthropogéniques. »
Cependant il y a peut-être une petite lueur d’espoir car la population originelle de melomys de Bramble Cay proviendrait du delta du fleuve Fly en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Par conséquent, il pourrait y avoir des melomys de Bramble Cay ou une espèce proche à cet endroit. L’espèce n’a peut-être pas disparu à l’échelle globale…
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Par Frawsy le 8 Juin 2016 à 13:57
Journée mondiale de l'océan : dix chiffres
étonnants à connaître
L'océan nous a fait naître, nous permet de respirer, nous fournit de la nourriture et récupère nos déchets. Il mérite largement une journée mondiale, qui est l'occasion de mieux le connaître. Voici dix chiffres à retenir, pour mieux le comprendre, et ne pas oublier ce que nous lui devons.
Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences
Christophe Bailhache en pleine prise de vue sur le récif corallien de l'île Glover, dans les Cayes du Belize, un archipel de la mer des Caraïbes. Son drôle d'appareil photographique permet de réaliser un outil de promenade virtuelle à la manière d'un Street View. Le programme XL Catlin Seaview Survey (initialement Catlin Seaview Survey), lancé en 2012, étudie les récifs coralliens de la planète. Celui-ci, au Belize, est l’un des plus grands du monde, après celui de la Grande Barrière de corail, en Australie. © Richard Vevers, Catlin Seaview Survey
1,37 milliard de kilomètres cubes d'eau
L’essentiel de l’eau que la Terre porte en surface est rassemblée dans l’océan mondial. En comparaison avec la taille de notre planète, ce volume, impressionnant pour les petits animaux que nous sommes, reste faible. En masse, l’océan mondial ne représente qu’environ 0,025 % de la planète. Même si elle en abrite sans doute autant dans les profondeurs de son manteau, la Terre reste une planète sèche.
70 % de l'oxygène que nous respirons
La plus grande part de l’oxygène que nous respirons (70 %) vient de l’océan, où il est produit par les organismes unicellulaires du phytoplancton, pour l'essentiel, et par les autres algues, petites ou grandes. Le reste vient des végétaux terrestres. Le chiffre, en fait, est mal connu, surtout les contributions respectives des différents organismes photosynthétiques. Des études sont menées aujourd’hui pour tenter de prédire comment cette production pourrait changer avec le réchauffement des couches superficielles de l’océan.
2,2 milliards de tonnes par an de CO2 absorbé
Entre 1992 et 2009, la quantité de gaz carbonique (CO2) que l’océan a absorbée était de 2,2 milliards de tonnes par an, selon les études internationales qui alimentent la base de données Socat(Surface ocean CO2 atlas).
L'entreprise japonais Shimizu a étudié la possibilité de faire vivre une communauté humaine en pleine mer. Son projet Ocean Spiral prévoit une sphère de 500 m de diamètre, constituée d'une trame de béton et de panneaux transparents, qui abrite des appartements, des hôtels, des bureaux et des laboratoires. Affleurant en surface, elle est ancrée au fond, entre 1.500 et 4.000 m, par l'intermédiaire d'une rampe hélicoïdale, maintenue par des câbles. D'énormes ballasts permettent de la faire émerger davantage, pour la maintenance, ou, à l'inverse, de l'enfoncer complètement sous la surface lorsqu'un cyclone est prévu. © Shimizu90 % des zones habitables de notre planète
Les neuf dixièmes des zones habitables de la Terre se trouvent dans l’océan à plus de 200 m sous la surface. Pourtant, ces écosystèmes profonds sont très mal connus. On en ignore encore largement la diversité des espèces, le fonctionnement écologique et les interactions avec les eaux superficielles. Il est donc difficile d’évaluer l’impact de la pêche profonde et des projets d’exploitation minière des grands fonds.
« Nous n’avons qu’une vision très parcellaire de la sensibilité de ces communautés d’organismes aux changements environnementaux, expliquait récemment Nadine Le Bris, chercheuse en écologie marine à Banyuls-sur-Mer, à l’occasion d’une étude sur les fonds marins publiée dans Science. Or, les réponses qu’ils seront en mesure de fournir pour y faire face risquent d’entraîner toute une cascade d’effets sur des écosystèmes océaniques interconnectés ».
274.000 d'espèces vivantes recensées
Le nombre d’espèces vivantes recensées, hors bactéries et archées, est, à coup sûr… faux. Comme l’a montré le programme Census of Marine Life, qui s’est intéressé aux grandes profondeurs, les organismes marins nous sont encore très largement inconnus. La diversité des nématodes, des vers ronds présents dans tous les milieux, à commencer par l’océan, défie par exemple toujours les zoologistes.
Mille milliards d'espèces vivantes estimées
En se basant sur les études actuelles de la biodiversité, terrestre et marine, notamment celle de l’expédition Tara Oceans, pour les plantes, les animaux et les micro-organismes, des biologistes américains estiment le nombre d’espèces vivant sur la Terre à 1012, c’est-à-dire mille milliards. L’essentiel est constitué de bactéries et beaucoup d’entre elles sont océaniques. Nous n’en connaissons qu’une infime partie.
Représentant moins de 0,1 % de la surface des océans, les récifs coralliens abritent environ un quart des espèces marines. © Jim Maragos, U.S. Fish and Wildlife Service269.000 tonnes de plastique flottant
L’estimation, réalisée en 2014, des morceaux de plastique flottant sur la surface de la mer, aboutissait à ce chiffre. Mais ce n’est que la pointe émergée de l’iceberg car on sait que ces déchetsse fragmentent et se répandent ensuite sous forme de petites particules.
150 millions de tonnes de déchets plastique
La quantité de déchets plastique aujourd’hui présente dans l'océan est de 150 millions de tonnes, selon un rapport (The New Plastics Economy) réalisé par la fondation Ellen McArthur et le cabinet McKinsey et présenté au dernier forum de Davos. Au rythme actuel, cette quantité devrait atteindre 750 millions de tonnes en 2050, soit la masse estimée de poissons de toutes les mers du monde.
Trois milliards de personnes vivent de la pêche
Selon le WWF, la source principale de protéines pour trois milliards de personnes est la pêche. Cette activité ferait vivre, avec l’aquaculture, 10 à 12 % de la population mondiale.
2,8 % de l'océan est protégé
La superficie des aires protégées de l’océan est de 2,8 % et devrait atteindre 10 % en 2020. C’est l’engagement pris par un grand nombre de pays en 2010. Depuis cet accord, l’augmentation est réelle mais la surface actuelle ne représente encore que moins de 3 % de celle de l’océan mondial.
Cette méduse rouge (Crossota norvegica) a été observée dans les profondeurs de l’Arctique grâce à un sous-marin téléguidé. © Kevin Raskoff, DR
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Par Frawsy le 1 Juin 2016 à 13:18
Météo : les prévisionnistes tiennent
compte du changement climatique
Comment l'évolution actuelle du climat, qui s'inscrit dans les décennies à venir, est-elle prise en compte par les météorologues, qui cherchent à prédire le temps des jours prochains ? Les échelles diffèrent, nous explique Aude Lemonsu, du CNRS et de Météo-France, mais ces deux sciences se nourrissent et évoluent, tandis que la demande de bonnes prévisions météo se fait plus forte dans de nombreux secteurs, comme l'énergie. Les données changent un peu, nous dit-elle, mais l'augmentation de puissance de calcul des ordinateurs influe aussi sur les simulations.
Climatologues et météorologues se sont rencontrés et ont dialogué avec le public du 28 au 30 mai, à Paris. © Aphelleon, Shutterstock
Le weekend dernier, sous la pluie parisienne, climatologues et météorologues se sont rencontrés et ont dialogué avec le public au forum Météo et climat. On a croisé des présentateurs célèbres mais aussi Jean Jouzel, climatologue, vice-président du Giec et par ailleurs président de l’association Météo et climat, organisatrice de l’évènement, ou encore Valérie Masson-Delmotte, coprésidente du Giec, bien connue de nos lecteurs et Hubert Reeves, le parrain de la rencontre.
Le sujet est devenu crucial aujourd’hui. Quand un épisode extrême survient, comme une caniculeou un niveau de pluviosité exceptionnel, la question se pose systématiquement de savoir si le changement climatique en cours est en cause ou non. Les climatologues répondent toujours qu’on ne peut rien conclure d’un seul évènement mais préviennent pourtant que la fréquence et l’ampleur de ces phénomènes extrêmes vont augmenter dans les années et les décennies à venir.
Comment lier ces deux activités ? Ces épisodes extrêmes vont-ils venir brouiller les prévisions météorologiques ? Ce sont les questions que nous avons posées à Aude Lemonsu, du CNRS et de Météo-France, qui participera à ce forum. Pour cette spécialiste de la météorologie en milieu urbain, les simulations continueront à évoluer, et ce pour plusieurs raisons.
Lorsqu'on produit du courant électrique, il faut s'appuyer sur les prévisions météo pour anticiper la demande. EDF a créé en 2014 un service climatique chargé d'analyser les masses colossales de données météo et de « bâtir un référentiel unifié de projections climatiques régionalisées au plus près des territoires ». © EDF, YouTubeFutura-Sciences : Sera-t-il possible de prévoir
des canicules en Europe ?
Aude Lemonsu : Il faut comprendre que climatologie et météorologie concernent des échelles de temps et d’espace très différentes. Les modèles climatiques travaillent sur de très grandes échelles. La résolution spatiale est de l’ordre de 100 km. C’est-à-dire que la simulation s’arrête à des carrés de cette taille. Pour les prévisions météorologiques, nous travaillons à l’échelle de l’Europe, ou de la Métropole. Nous pouvons prendre en compte les effets d’une chaîne de montagnes ou d’une ligne côtière. Dans l’outil de simulation Arome, utilisé par Météo-France, la résolution est de 2,5 km. Les canicules, et les phénomènes extrêmes, s’étudient sur des décennies et on ne peut que donner des probabilités de survenue.
Les outils de simulation devront-ils évoluer ?
Aude Lemonsu : Ils évoluent en permanence ! Les équations ne changent pas, mais les paramètres peuvent bouger. Les laboratoires de recherche travaillent continûment à améliorer ces modèles et les données de la climatologie servent à cela. Les outils de simulation évoluent aussi avec l’augmentation de puissance des ordinateurs. Et nous vérifions également, après coup, l’accord entre prévisions et réalité, ce qui permet d'affiner.
Quel genre d’améliorations peut-on attendre ?
Aude Lemonsu : L’augmentation de la résolution, notamment, avec une meilleure prise en compte des particularités locales. Pour les canicules, nous cherchons par exemple l’effet du milieu urbain. Avec l’artificialisation des sols, des îlots de chaleur se créent, avec des températures plus élevées, surtout la nuit. Or, la fraîcheur nocturne est utile au corps pour récupérer. Météo-France a une mission d’alerte et les demandes sont fortes, de la part des collectivités locales, par exemple, pour les plans d’urbanisme mais aussi des entreprises, des fournisseurs d’énergie, etc. Pour poursuivre ces améliorations, nous avons donc besoin d’une bonne puissance de recherche en amont.
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