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    Le sac de Nankin
     
     

    Ce qui a été appelé le « sac de Nankin » est sans aucun doute la plus grande tragédie du conflit sino-japonais.


    Pendant six semaines, l’armée nippone va se livrer à d’effroyables massacres sur la population civile. Le bilan, selon les autorités chinoises, s’élève à 250 000 victimes civiles et militaires.


    La prise ou « sac » de Nankin, par sa violence, illustre de la pire façon les solutions extrêmes issues du culte de la supériorité militaire japonaise.

     
     
     

     

     Le conflit sino-japonais

     

    La Seconde Guerre mondiale et le conflit sino-japonais qui a commencé juste auparavant (1937-1945) ont donné lieu à de terrifiantes exactions en Chine et dans toute l’Asie du Sud-Est.

     

    Quand les premiers soldats japonais entrent le 13 décembre 1937 à Nankin, la capitale de la Chine nationaliste a été évacuée le mois précédent par le général Tchang Kaï-chek (surnommé le " Gimo "). Abandonnée par une grande partie de sa population, la métropole a en revanche accueilli des centaines de milliers de réfugiés. Cela fait cinq mois que la guerre sino-japonaise fait rage. Les Japonais, malgré la résistance chinoise, sont entrés en force pour occuper sa capitale historique - Pékin, alors appelée Peiping, la " Paix du Nord " - sa capitale économique, Shanghai, et Canton, la capitale du Sud.

     

    La violence avait déjà régné lors de la longue bataille pour Shanghai, l'armée japonaise écrasant civils et militaires sous un déluge de feu. Mais c'est pendant ce que l'on a appelé le " sac de Nankin " - en anglais, on dit avec plus de réalisme le " viol de Nankin " - que l'horreur a atteint son paroxysme.

     

    Au cours du mois de juillet 1937, les armées japonaises qui envahissent la Chine, obtiennent des victoires foudroyantes : Pékin, la Mongolie et le nord du pays tombent au mois d’août.

     

    L'armée japonaise défile devant l'empereur avant d'envahir la Chine

     

    Quand les Japonais franchirent les hautes murailles construites par les empereurs Ming autour de Nankin, rares étaient ceux qui s'attendaient au pire. Le général Tang Seng Shih, commandant de la place, s'était enfui et son armée avait jeté armes et uniformes dans les rues. Les tracts lancés par avion prêchaient le calme : " Les troupes japonaises s'appliqueront à protéger les bons citoyens et à leur permettre de vivre en paix, dans l'exercice normal de leurs occupations ", assuraient-ils.

     

     

    Des soldats livrés à eux-mêmes



    Ivres de victoire, de fureur, les soldats nippons furent lâchés dans Nankin comme des bêtes fauves, sans contrôle pendant des jours. Ils venaient de perdre 40 000 camarades - contre 450 000 pour les Chinois - face à des adversaires qu'ils méprisaient. Ils s'étaient battus pendant des mois dans des conditions affreuses. Le jour de la revanche était arrivé.

     

    La ville fut mise à sac, incendiée par des soudards ne respectant ni hôpitaux, ni écoles, ni églises, ni locaux couverts par l'immunité diplomatique.

     

    Le 13 décembre 1937, les troupes japonaises entrent dans Nankin

     

    Ce massacre gratuit a été d’autant plus facile que les soldats chinois ont livré à l’ennemi 500 000 personnes sans aucun moyen de défense.

     

    De plus, à aucun moment, leur commandement ne cherche à limiter leurs débordements.

     

     

    Tortures, viols et meurtres

     

    Les témoignages des rares étrangers restés sur place sont terribles : viols, exécutions, massacres en masse... Les femmes étaient violées sur place, écolières dans leurs dortoirs, infirmières dans les hôpitaux, Volonté d'humilier tout un peuple, obsession sexuelle d'hommes soumis à une violence institutionnalisée, qui traumatisèrent toute une ville, tout un peuple.

     

    Enfants et vieillards sont sauvagement massacrés ainsi que les quelques rares soldats restés dans la ville.
    Le nombre des victimes de cette dizaine de jours d'orgie meurtrière n'a jamais été établi avec certitude. Robert Guillain, alors tout jeune envoyé spécial de l'agence Havas en Chine, donne dans ses souvenirs le chiffre de 200 000 victimes.

     

    Après quelques jours de cette tuerie, les artères de la ville sont jonchées de monceaux de cadavres
    (43 000 selon la Croix-Rouge chinoise). Ces corps sont laissés sur place au risque de provoquer des épidémies.

     

    Des témoins ont évoqué le raffinement des supplices que les Japonais faisaient subir à leurs victimes.


    Les meurtres et les viols ne suffisent pas ; les militaires inventent de nouveaux procédés : ils font déshabiller les hommes et les femmes puis les laissent mourir de froid ; ils les enterrent vivants ; les obligent à boire du kérosène ou les éventrent à coup de baïonnette.


    Les femmes ont été les principales cibles de cette barbarie ; fillettes, femmes enceintes ou âgées, les viols sont suivis du meurtre ou de mutilations.

     

    Sur cette photo d'archives, des chinois sont enterrés vifs

     

    La boucherie fut bien organisée : au cours du " recensement " de la population, raconte H.J. Timperley, " on annonça à la foule que s'il y avait parmi elle d'anciens soldats et qu'ils sortaient des rangs, ils auraient la vie sauve et on les emploierait comme travailleurs. Deux cent quarante sortirent des rangs... Deux ou trois survécurent pour narrer leur sort... L'un des groupes avait été mitraillé, l'autre, entouré de soldats, fut employé comme objectif pour l'escrime à la baïonnette ". D'autres, ficelés ensemble, furent arrosés d'essence et brûlés vifs, noyés ou utilisés pour l'exercice au sabre par les samouraïs en folie... Soldats, fonctionnaires furent massacrés systématiquement.

     

     

    Le Japon haï

     

    Après la bataille de Shanghai, le " sac de Nankin " a été le révélateur d'un nouveau nationalisme chinois.


    Des épisodes comparables se sont déroulés dans le reste de la Chine occupée entre 1937 et 1945.


    On retrouve partout cette même violence absurde et ce même mépris de l’adversaire.

     

    Illustration. En 1937, un sous-marin japonais coula pour le plaisir des jonques de pêche chinoises, faisant près de 300 victimes

     


    Il faudra plus de vingt ans pour que Pékin, comme d'ailleurs Séoul, acceptent d'absoudre le Japon.


    Si toutes ces horreurs ont été possibles, c’est parce que les ordres venaient du gouvernement japonais. La torture était largement autorisée. Les services secrets japonais avaient rédigé un mode d’emploi de la torture avec notamment cette prescription : « Il est nécessaire de ne pas oublier que les méthodes de torture doivent être telles qu’on puisse facilement les appliquer et il ne faut pas qu’elles suscitent des sentiments de pitié ».

     

    Le procès de Tokyo, institué par MacArthur, pour juger les crimes commis en Asie. Sept condamnations à mort par pendaison ont été prononcées en 1948 dont celle de Hirota, accusé plus particulièrement des atrocités perpétrées en Chine . Library of Congress

     

    Récemment, les jeunes chinois ont exprimé leur colère en constatant à quel point les autorités japonaises minimisaient leurs exactions dans leurs livres d’histoire.


    Encore aujourd’hui, 60 ans après les faits, personne n’a oublié le sac de Nankin.

     

    V.B (Avril 2005)

     

    Références bibliographiques

    Reader's Digest Sélection, Iris Chang Et L'horreur Du Massacre De Nankin "Elle N'oubliera Jamais" N° 626
    Le sac de Nankin. L'Histoire du Monde . Editions Larousse 1994

     

     

     

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    Histoire: Unité 731

     

    Les médecins maudits de

    l’armée japonaise

     

     

    En Mandchourie, à partir de 1931, une unité spéciale des troupes japonaises met sur pied un centre d’expérimentation sur l’utilisation militaire de l’arme bactériologique.


    Dans le plus grand secret, deux ans plus tard, une équipe dirigée par le médecin Shiro Ishii commence à utiliser des cobayes humains pour des expériences.

     

     

    Histoire Moderne:  Unité 731 - Les médecins maudits de l’armée japonaise


    Le secret a été gardé pendant longtemps, y compris par les Etats-Unis. Au total, entre 1933 et 1945, 3 000 personnes environ sont mortes dans ce laboratoire de l’horreur, nommé « unité 731 ».

     
     
     

     

    L’unité 731

     

    C’est récemment seulement que l’ampleur et l’horreur des expériences menées ont été révélées. Les agissements de cette équipe de « savants » pervers n’ont d’égal que ceux des médecins nazis dans les camps de concentration.

     

    Le laboratoire de la mort est installé dans l’Etat du Mandchoukuo, à Pingfan, au sud de Harbin. Son objectif principal est la mise au point d’une arme bactériologique. A cet effet, un énorme complexe de 150 bâtiments est construit.

     

    Histoire Moderne:  Unité 731 - Les médecins maudits de l’armée japonaise

     

    Au plus fort de son activité, à partir de 1938, le complexe regroupe des milliers de collaborateurs. Leur objectif principal est de mettre au point les armes bactériologiques les plus meurtrières.

     

    Dans un des bâtiments, le « bloc Rô », les chercheurs font des expériences sur des êtres humains.

     

    Harbin est une ville qui constitue la source de recrutement des victimes. Soldats chinois, intellectuels ou toute personne soupçonnée d’agitation deviennent les victimes des expérimentations japonaises.

     

    Le général Shiro Ishii, bactériologiste et responsable de l'unité 731

     

    Mais, on sait que des soldats Américains, Australiens, Néo-Zélandais et Anglais, incarcérés dans le camp de Moukden, à 500 km de Pingfan ont également été victimes de ces savants fous.


    Des envoyés délégués par les médecins ont soumis les soldats à la contagion de différentes souches bactériennes. Tous les cadavres ont été systématiquement autopsiés et les résultats envoyés à l’unité 731.

     

     

    Les cobayes humains

     

    Lorsque les prisonniers arrivent dans le bloc Rô, c’est pour ne plus en sortir vivants. Dès leur arrivée, ils deviennent des « marutas » c’est-à-dire des « bouts de bois ». Cela signifie que l’on ne leur reconnaît plus aucune humanité. Ce ne sont que des objets à qui l’on peut faire subir les pires atrocités.

     

    Et l’imagination sadique des savants japonais est sans limite. Tout est bon pour améliorer les armes bactériologiques et renforcer la résistance des soldats japonais.

     

    Des souches sélectionnées de maladie, peste, choléra, dysenterie, typhus, sont inoculées sur des individus sains.
    Après quoi, on regarde leurs effets et leur évolution. Quand un patient survit à un premier virus, un deuxième lui est injecté. Et cela continue jusqu’à la mort dans les pires souffrances.

     

    Des bombes à la gangrène, du cyanure, différents gaz sont alternativement essayés, sous prétexte d’étudier la durée et les formes de l’agonie.

     

    Les effets du froid intéressent également beaucoup les japonais. On laisse des prisonniers geler littéralement dans l’hiver mandchou, puis on tente de réchauffer leurs membres en observant la rapidité de la nécrose de ceux-ci.

     

    La résistance humaine est également testée : combien de temps faut-il pour qu’un être humain meurt, privé de sommeil ou de faim ou de déshydratation ?

     

    Certaines expériences ne peuvent être légitimées par aucune rationalité scientifique. Ce sont l’œuvre d’esprits sadiques et malades :

     

    • Greffes d’animaux sur des corps humains
    • Exposition prolongée aux rayons X
    • Exposition à une surpression atmosphérique
    • Vivisection
    • Corps bouillis vifs

     

     

    La fin du cauchemar

     

    En 1944, alors que les troupes américaines avancent dans le Pacifique, l’unité 731 est prête à fournir un grand nombre d’armes bactériologiques. Pourtant, l’état-major nippon ne donne pas l’ordre de les utiliser.

     

    Après la destruction d’Hiroshima, en août 1945, et l’invasion de la Mandchourie par les troupes soviétiques, le laboratoire est déserté.

     

    Mais, auparavant, tous les prisonniers encore vivants sont exécutés. Les cadavres sont incinérés, les bâtiments détruits. Les familles des scientifiques sont déplacées et les savants fuient au Japon.

     

     

    L'unité 731

     

    Ainsi, toute trace compromettante est effacée et le silence est observé pendant de longues années sur la demande même des autorités japonaises.


    Les Etats-Unis acceptent d’oublier cette barbarie en échange de rapports normalisés. Aucun procès n’eut lieu et contrairement aux médecins nazis, ces savants japonais ne durent jamais répondre de leurs actes.

     

    Mais, à l’aube de leur vie, des anciens de l’unité 731, comme le lieutenant-colonel Toshihide, ont décidé de se décharger de leur fardeau.


    Des témoignages ont été recueillis dans « La guerre bactériologique », de P.Williams et D.Wallace, un ouvrage de référence publié aux éditions Albin Michel.

     

    V.B (07.2005)

     

    Bibliographie principale

    La Mémoire de l'humanité. Editions Larousse 1994. La guerre bactériologique P.Williams et D.Wallace. Editions Albin Michel 1990

     

    Histoire Moderne:  Unité 731 - Les médecins maudits de l’armée japonaise

     

     

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    Watergate
     
     

    En juin 1972, les journalistes Robert Woodward et Carl Bernstein, du quotidien Washington Post, révèlent à l'opinion une effarante affaire d'espionnage politique qui va rapidement devenir le scandale du Watergate.

     

    Vice-président républicain du temps d' Eisenhower, Richard Nixon, battu par Kennedy en 1960, est élu président des États-Unis en 1968, et réélu en 1972. Il est alors accusé d'avoir menti au sujet de micros posés au siège du parti démocrate, dans l'immeuble du Watergate. Objet d'une procédure d'impeachment, il est contraint à démissionner, malgré ses succès en politique étrangère.


    Le scandale du Watergate pose le problème de la toute puissance du Président des Etats-Unis. Cet homme a-t-il tous les droits, dont celui de faire espionner ses adversaires ?


    Il reste un mystère à résoudre concernant l’affaire du Watergate et il est fort probable que toute la lumière ne sera jamais faite sur un scandale qui a ébranlé les Etats-Unis.

     

     
     
     

     

     Richard Nixon

     

    Richard Milhous Nixon est né en Californie en 1913. Sa carrière politique a brillamment débuté. Dès son retour de la guerre du Pacifique, ce juriste est élu au Congrès, puis devient sénateur en 1950.

     

    Anticommuniste virulent, il est réputé pour être un politicien peu scrupuleux. Il est inquiété dès les années 1950 sur ses sources de financement.


    Cette réputation lui a valu le surnom de « Tricky Dicky » Dick le tricheur.

     

    Républicain, il représente la tendance la plus conservatrice de son parti. Il est vice-président des États-Unis sous Eisenhower (1953-1961).

     

    Battu aux élections présidentielles de 1960 par John Kennedy, il est élu en 1968 et réélu en 1972. Malgré son anticommunisme, il entretient des relations satisfaisantes avec l’U.R.S.S, reconnaît la Chine populaire et se rend à Pékin en 1972.

     

    Election de Richard Nixon en 1969 © AP/Sipa

     

    Ce voyage a bouleversé la fin du 20e siècle. Cette rencontre avec Mao Zedong a ouvert la voie à la reprise de relations entre deux pays qui s’étaient ignorés depuis plus de 20 ans.

     

    Secondé par H. Kissinger, il obtient des succès diplomatiques importants. Il met fin à la guerre du Viêt Nam (accords de Paris, 1973) et obtient l’engagement de négociations entre Israël et l’Égypte après la guerre du Kippour (1973).

     

    Malgré une fin peu glorieuse, Richard Nixon reste l’un des meilleurs présidents des Etats-Unis.

     

     

    Le déclenchement du scandale du Watergate

     

    A Washington, peu après 1h30 du matin, le 17 juin 1972, un gardien qui fait une ronde de routine dans l'immeuble nommé Watergate, un vaste complexe de bureaux et d'hôtels, découvre, dans une cage d'escalier, une porte dont la serrure est maintenue ouverte par du ruban adhésif. Il ne se doute pas qu'il vient de déclencher le plus grand scandale politique de l'histoire américaine.

     

    Il prévient la police; cinq rôdeurs se trouvaient au siège du Comité national démocrate, qui a loué temporairement des locaux dans l'immeuble pour la campagne de son candidat à l'élection présidentielle de 1972, George McGovern.


    Quelques mois plus tard, en novembre 1972, le républicain Richard Nixon remporte une très large victoire sur son rival démocrate. Mais le cambriolage du Watergate va vite dévoiler une partie d'une inextricable toile d'araignée où se combinent le sabotage politique et la corruption.

     

    Bob Woodward et Carl Bernstein © Corbis

     

    L'obstination de deux jeunes reporters du Washington Post, Bob Woodward et Carl Bernstein, va mettre en lumière un écheveau de malhonnêteté et aboutir à la démission du président Nixon, le 9 août 1974.

     

    Le scandale du Watergate, en révélant les comportements du pouvoir à Washington, ébranlera la confiance des Américains dans leur gouvernement et entraînera la mise en accusation de plus de trente collaborateurs de la Maison-Blanche. Cependant, certains éléments du dossier demeurent encore mystérieux aujourd'hui.

     

     

    La première phase judiciaire

     

    Très vite, l'enquête, menée tant par les policiers que par les journalistes d'investigation, révèle des complicités dans l'affaire du Watergate, qui remontent jusqu'aux personnalités les plus proches de Nixon, et jusqu'à Nixon lui-même. Ce dernier serait coupable non seulement d'avoir ordonné l'espionnage du parti adverse, mais aussi d'avoir inspiré le cambriolage du cabinet d'un psychiatre qui était en possession de documents compromettants pour lui, et, enfin, d'avoir détourné pour son propre usage des fonds destinés à sa campagne.

     

    Immeuble du Watergate. By Enlewof. (CC BY-NC-ND 3.0)

     

    Plusieurs instances judiciaires mènent l'offensive contre le président. Une commission du Sénat enquête sur la campagne électorale de 1972. La commission judiciaire de la Chambre des représentants réunit des éléments qui permettraient de proposer la destitution du président. La Cour suprême fédérale le presse de livrer des pièces à conviction en dénonçant ce que Nixon appelle « le privilège de l'exécutif ».

     

    Enfin, un procureur spécial mène une instruction sur les agissements de ses proches. Le 8 janvier 1973 s'ouvre, devant le tribunal fédéral de Washington, le premier procès concernant l'affaire : ne comparaissent alors que des exécutants, notamment les dénommés Liddy et Mac Cord. Ils sont évidemment condamnés, mais le verdict ne peut suffire à arrêter le scandale.

     

     

    Les hommes du Président

     

    Bernstein et Woodward, avec l'aide d'un informateur secret appelé Deep Throat (Gorge profonde) et d'autres « complices » sont progressivement à même de faire figurer les noms de Donald Segretti, E. Howard Hunt, G. Gordon Liddy et de beaucoup d'autres dans un vaste réseau qui tente sans scrupule de faire trébucher tout opposant au gouvernement Nixon.

     

    R. Nixon lors de son voyage en Chine © Xinhua-Chine Nouvelle/Gamma

     

    Les deux reporters parviennent à faire le lien entre John Mitchell - ancien avocat de Nixon puis attorney général (c'est-à-dire ministre de la justice) avant de diriger le Comité pour la réélection du président - et un coffre-fort où sont conservés les dons en liquide faits au candidat Nixon. Ils découvrent que Mitchell a autorisé l'emploi de 250 000 dollars pour financer le cambriolage du Watergate, et que E. Howard Hunt a organisé un groupe (surnommé par la presse « les plombiers de la Maison-Blanche ») chargé de fabriquer des lettres destinées à ruiner la réputation de certains candidats démocrates.

     

     

    La procédure d'« impeachment »

     

    Cette procédure complexe vise théoriquement à poursuivre en justice tout fonctionnaire suspect de s'être rendu coupable de crimes ou de délits, du petit administrateur au président des États-Unis. Elle traduit la responsabilité pénale de toutes les autorités.


    Dans les faits, cette procédure, que seul le Congrès peut mettre en oeuvre et qui est généralement fort longue, est exceptionnellement utilisée. Ainsi, au XXe siècle, si l'on excepte la destitution de quelques juges fédéraux, l'impeachment n'a guère été utilisé qu'à l'encontre du président Nixon.

     

     

    La deuxième phase judiciaire

     

    Au début du mois de mars 1974 commence la deuxième phase judiciaire du Watergate. Des hommes de première importance, et non plus des lampistes, comparaissent devant le Grand Jury, un tribunal préliminaire chargé d'établir les chefs d'inculpation : ils ont pour noms John D. Ehrlichman, H. R. Haldeman, Gordon Strachan et Charles W. Colson; Robert C. Mardian et Kenneth W. Parkinson - ces deux derniers ayant dirigé le comité chargé de la récente campagne électorale grâce à laquelle Richard Nixon a été triomphalement réélu; ou encore John N. Mitchell, qui ne fut rien de moins que... ministre de la justice.

     

    Toutes ces personnes sont accusées d'avoir entravé la justice en tentant d'étouffer l'affaire du Watergate et, certaines d'entre elles, d'avoir été impliquées dans le cambriolage du cabinet du psychanalyste.

     

    President Nixon meeting with Attorney-General Eliott Richardson and FBI Director-designate Clarence M. Kelly, 07/07/1973. ARC Identifier: 194514 . Licence

     

    Après cette deuxième phase consistant à inculper les personnes, commence la troisième étape judiciaire du Watergate : les procès des inculpés. Le premier de ces procès est celui de John Ehrlichman, condamné en juillet 1974 pour association de malfaiteurs et parjure dans l'affaire du cambriolage du psychanalyste.

     

    Parallèlement, le président Nixon est sommé par la Commission judiciaire, 1e 11 avril, de remettre des enregistrements considérés comme des pièces à conviction essentielles, et la même requête lui est présentée de la part des sénateurs. Or, il s'y refuse; en conséquence, une procédure d'urgence est engagée auprès de la Cour suprême.

     

     

    La démission de Richard Nixon

     

    Préférant partir avant d'être déchu par décision judiciaire, le président démissionne le 8 août 1974. Le mois suivant, le nouveau président, Gerald Ford, met un terme aux poursuites engagées contre son prédécesseur en prononçant sa grâce, précisant qu'il souhaite mettre un point final à une affaire qui n'a que trop agité le pays et que la démission de Nixon est, pour cet homme d'État, une punition déjà suffisante

     

    La décision de Ford ne clôt cependant pas l'affaire en ce qui concerne les collaborateurs du président qui seront condamnés à des peines de prison.

     

     

     

    Discours de démission du 8 août 1974

     

    « From the discussions I have had with Congressional and other leaders, I have concluded that because of the Watergate matter, I might not have the support of the Congress that I would consider necessary to back the very difficult decisions and carry out the duties of this office in the way that the interests of the nation would require. I have never been a quitter. To leave office before my term is completed is abhorrent to every instinct in my body. But as President, I must put the interests of America first. »

     

    Traduction :


    « D'après les discussions que j'ai eues avec des membres du congrès et d'autres leaders, j'ai conclu qu'à cause de l'affaire du Watergate, je n'aurais sans doute plus l'appui du Congrès, appui que je considère comme indispensable pour prendre des décisions très difficiles et pour m'aider à accomplir les devoirs de ma charge dans le sens des intérêts de la nation. Quand je commence quelque chose, je le termine. Abandonner mes fonctions avant que mon mandat ne soit terminé est contraire à tous mes instincts. Mais comme Président, je dois faire passer en premier les intérêts des États-Unis. »

     

     

    Qui était Gorge profonde ?

     

    Le premier mystère concernant l'identité de Gorge profonde, principale source d'information pour Bob Woodward durant toute son enquête, a été résolu en 2005.

     

    Surnommé ainsi par le rédacteur en chef du Washington Post, en référence à un film pornographique du moment, Gorge profonde occupait un poste important « dans un organisme du pouvoir exécutif et avait accès à des informations aussi bien au Comité pour la réélection du président qu'à la Maison-Blanche », comme l'écrit Woodward dans les Hommes du Président. « C'était un intarissable bavard, soucieux de dénoncer les rumeurs, qui en même temps le fascinaient [...]

     

    Woodward accepta de ne jamais le citer, même comme source anonyme. Gorge profonde se contentait de confirmer les informations glanées ailleurs et de faire comprendre à Bernstein et à Woodward s'ils s'orientaient ou non dans la bonne direction.

     

    Départ du Président de la Maison Blanche en 1974. Licence

     

    Lorsque l'atmosphère autour du Watergate fut devenue plus lourde, Woodward convint d'un code avec son informateur: si celui-ci voyait un petit pot de fleurs avec un drapeau rouge sur le balcon de Woodward, ils devaient se retrouver, à deux heures du matin, dans un parking. S'il voulait rencontrer Woodward, il entourait d'un cercle le numéro de la page 20 du New York Times et dessinait des aiguilles indiquant l'heure du rendez-vous.

     

    Parmi les journalistes et observateurs qui se sont interrogés sur l'identité de Gorge profonde, beaucoup ont remarqué que l'enquête du Washington Post présentait d'étranges et nombreuses similitudes avec celle du FBI.


    Woodward a dit qu'il dévoilerait l'identité de son informateur à l'approche de sa mort.

     

    Finalement, la véritable identité de Gorge profonde a été révélée par le magazine Vanity Fair du 31 mai 2005. C'était W. Mark Felt, l'ancien directeur adjoint du FBI sous Richard Nixon.
    Agé de 91 ans, on ne sait pas s’il a voulu « libérer sa conscience » comme il l’a prétendu ou réaliser quelques bénéfices …

     

     

    Un blanc de 18 minutes

     

    Le second mystère du Watergate est l'étrange « blanc » de dix-huit minutes qui figure sur l'un des enregistrements effectués dans le bureau de Richard Nixon à la Maison-Blanche. Il a été découvert par le procureur Archibald Cox durant son enquête.

     

    En effet, toutes les conversations du président étaient enregistrées. Or un long bourdonnement sur deux tons rend opportunément inaudible une conversation concernant le scandale du Watergate entre Nixon et son chef de cabinet, H. R. Haldeman.

     

    La secrétaire personnelle de Nixon, Rose Mary Woods, a admis qu'elle aurait pu causer une interruption de quatre ou cinq minutes en appuyant accidentellement sur un mauvais bouton lors d'un appel téléphonique, mais elle a soutenu ne pas avoir pu effacer une aussi longue partie de l'enregistrement.

     

    Alors qu'elle vérifiait les bandes, à Camp David, Nixon était entré brièvement dans la pièce et, sous prétexte d'en écouter quelques extraits, il avait manipulé à plusieurs reprises les boutons de défilement « avant » et « arrière ». On s'est donc demandé si le président n'avait pas créé lui-même ce blanc de dix-huit minutes.


    Nixon était sans doute le seul à savoir si le bourdonnement qui couvrait la conversation était le fruit de sa propre volonté... Il a en tout cas emporté son secret avec lui, lorsqu'il est mort en 1994.

     

    V.B (2.10.2006)

     

    Références

    Le Watergate, Kaspi André. Editions complexe 1983
    Gorge Profonde - La Véritable Histoire De L'homme Du Watergate, Woodward Bob. Editions Denoël 2005

     

     

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    Qui a assassiné John Kennedy ?

     

     

    Le 22 novembre 1963, John Fitzgerald Kennedy, qui effectue une visite à Dallas, est assassiné, officiellement par Lee Harvey Oswald.


    Un documentaire allemand affirme que John Kennedy a été assassiné à Dallas par Lee Harvey Oswald sur ordre des services secrets cubains. C'est la thèse du film de Wilfried Huismann intitulé "Rendez-vous avec la mort" qui doit être présenté le 6 janvier sur la chaîne publique ARD.


    Ce film relance donc la théorie du complot castriste qui avait déjà été envisagée peu après l’assassinat mais considérée comme peu vraisemblable.

     
     
     

    L’attentat de Dallas

     

    En ce vendredi 22 novembre 1963, John Kennedy, 35e président des Etats-Unis depuis 1960, visite Dallas au Texas, étape de sa tournée en vue de sa candidature à la réélection l’année suivante.

    Le temps est splendide et le jeune président, accompagné de sa femme, prennent place dans une limousine décapotable, à l’aéroport de Dallas à 11 h 51.

    John Kennedy à Dallas

    John Kennedy à Dallas. United States Federal Government

     

    Comme le cortège arrive dans le centre ville, des coups de feu éclatent : touché à la tête, Kennedy s’effondre dans la voiture. Il est alors 12 h 30.

    Ce sont trois coups de fusil qui ont été tirés du cinquième étage d’une maison proche du parcours officiel.

    Sur un film amateur, on peut constater la panique qui règne au sein du cortège.

    Jacqueline Kennedy hurle en se penchant vers son mari, puis essaye de récupérer à l’arrière de la voiture un fragment du crâne de son mari.

    Assassinat de John Kennedy

    Assassinat de John Kennedy. (Photo tirée du film amateur)

     

    Un garde court vers la voiture et saute à bord pour protéger le Président mais il est déjà trop tard.

    Une course folle s’engage vers l’hôpital où le président est admis à 12 h 38. Malheureusement, il meurt 30 minutes après l’attentat sans avoir jamais repris connaissance.

    Juste après les détonations, un homme est arrêté. Il s’agit de Lee Harvey Oswald. C’est un ancien soldat du corps des marines.


    Il sera lui-même assassiné la veille de l’inhumation du président par Jacob Rubinstein, dit Jack Ruby, bien connu des services de police.

    Assassinat de John Kennedy.

    (Photo tirée du film amateur)

     

    Oswald ayant été le seul acteur direct supposé de l’assassinat, les circonstances précises de la mort de Kennedy n’ont, jusqu’à aujourd’hui, jamais été officiellement élucidées.
    Les véritables responsables sont toujours restés dans l’ombre.

     

    L’arrestation de Lee Harvey Oswald

     

    Oswald travaillait à la bibliothèque située dans la rue de l’attentat. Il a quitté cette bibliothèque quelques minutes après l’assassinat.


    Lors de son arrestation, il clame son innocence. Cependant, les présomptions sont énormes. L’arme du crime, découverte dans la bibliothèque, lui appartient.

     

    Le lendemain, lors de son transfert en prison, il est abattu par Jack Ruby, un tenancier de boîte de nuit, qui affirme avoir voulu venger le président.

     

    Lee Harvey Oswald

    Lee Harvey Oswald qui sort du commissariat quelques instants avant de se faire assassiner par Jack Ruby. United States Federal Government

     

    La mort prématurée du principal suspect laisse planer des doutes sur les circonstances exactes de l’assassinat mais surtout sur les motifs du tueur.


    Etait-il vraiment coupable et si oui, a-t-il agi seul ou était-il manipulé.

     

    Le film de Wilfried Huismann apporte, en s'appuyant sur le témoignage d'un enquêteur ayant interrogé Oswald, une nouvelle lumière sur ce personnage qui n'aurait pas été un solitaire névrotique mais un homme cultivé, capable d'humour mais fanatiquement anti-américain.

     

    Quant à Jack Ruby, le vengeur providentiel, était-il lié à la Mafia comme cela a été supposé ?

     

    Une chose est certaine, les mesures de sécurité semblent avoir été bien « légères » lors du passage du cortège le 22 novembre ainsi que lors du transfert du présumé tueur.

     

     

    Le rapport Warren

     

    Le nouveau président, Lyndon B. Johnson, nomme immédiatement une commission d’enquête, présidée par le chef de la Cour suprême, le juge Warren.

     

    La commission travaille pendant 10 mois. Les conclusions de la commission sont formelles : Kennedy a bien été assassiné par Oswald. Ce dernier a agi seul, par démence et non pour des raisons politiques.

     

    Mais, le rapport Warren contient des contradictions et ne répond pas à toutes les questions.

     

    Plusieurs témoins sont certains d’avoir entendu des coups de feu partir de l’autre côté de la rue, d’un monticule d’où se dressait une palissade.

     

    Quelqu’un a-t-il armé la main d’Oswald, qui a vécu en URSS, et fréquenté des milieux favorables à la révolution cubaine ?
    Y avait-il plusieurs tueurs ?

     

    Enfin la personnalité de Jack Ruby et sa mort bien rapide en prison en 1967 rendent son geste suspect.

     

    Tout dans cette affaire fait penser à une conspiration politique. Oui, mais qui est le cerveau de cette conspiration et pourquoi ?

     

     

    La théorie du complot castriste

     

    Déjà à l’époque, certains pensaient que l’assassinat avait été commandité par Cuba ou Moscou.
    En effet, Kennedy a couvert la tentative d’invasion de Cuba, organisée par des réfugiés anticastristes et par la CIA.


    Il s’est ensuite opposé à toutes les provocations politiques soviétiques, notamment lors de la crise suscitée par l’installation de missiles soviétiques à Cuba en 1962.


    Il aurait même approuvé plusieurs complots organisés par les services secrets pour éliminer Fidel Castro.

     

    Kennedy en pleine crise de Cuba

    Kennedy en pleine crise de Cuba. United States Federal Government

     

    Cette théorie est défendue par Wilfried Huismann dan son documentaire. "C'était la vengeance de Castro pour la tentative de la CIA de l'assassiner avec un stylo bic empoisonné", affirme t-il.

     

    Un témoin important en la personne d'Oscar Marino, ancien membre du service secret cubain et compagnon de la première heure de Castro, devenu très amer contre Castro à qui il reprochait son alignement excessif sur Moscou, a affirmé à Huismann qu'Oswald avait agi pour le compte des services secrets cubains.

     

    La théorie du complot intérieur

     

    Après la crise cubaine, dès 1963, Kennedy a engagé une politique de détente avec les Soviétiques. Dans le contexte de l’époque, ce retournement était loin d’être approuvé par tout le monde.


    Il aurait alors été victime d’un complot liant le Pentagone, les anticastristes, l’ensemble du complexe militaro-industriel et la CIA, tous opposés à la détente Est-Ouest.

     

    Il a été affirmé que Kennedy souhaitait réorganiser complètement les services secrets d’où une détérioration des relations avec la CIA.

     

    Cette théorie a le mérite d’expliquer comment le président a pu être assassiné aussi facilement, comment son tueur a lui-même été abattu, comment Jack Ruby est mort aussi rapidement et pourquoi le rapport Warren est aussi confus.

     

     

    La théorie de la mafia

     

    Une autre hypothèse souvent avancée est l’assassinat commandité par la mafia. Kennedy aurait pu vouloir lutter contre la corruption et les agissements de cette organisation criminelle.
    En 1991, la confession de Judith Campbell, ex-maîtresse de Kennedy, a jeté un éclairage fort différent sur cette hypothèse.

     

    En effet, elle a affirmé que le président avait bien été assassiné par la mafia mais, non pas parce qu’il était intègre, mais parce qu’il aurait été pris au piège de ses compromissions. Elle a prétendu qu’il recourait aux services de la mafia et à son appui financier lors de ses campagnes électorales puis l’aurait abandonné ensuite.

     

     

    La mort de Marilyn Monroe

     

    La mort de la célèbre actrice, le 4 août 1962, est-elle liée à cette sinistre affaire ? Si officiellement, elle s’est suicidée, les indices qui accréditent l’hypothèse d’un meurtre sont évidents.

     

    L’actrice était très liée au président Kennedy mais également à son frère, le ministre de la Justice, Robert Kennedy.

     

    Les hypothèses de conspiration relient souvent la mort de Marilyn à une « Kennedy connection ». L’a-t-on tué pour l’empêcher de rendre publiques ses relations avec les deux frères ?
    Cela semble douteux.

     

    Sa mort a également été imputée à la Mafia. Par dépit amoureux, la star aurait-elle voulu dévoiler des relations « houleuses » entre la famille Kennedy et l’organisation criminelle ?

     

    Il est certain, en tout cas, que la ligne téléphonique de l’actrice a été mise sur écoute par le ministère de la Justice mais aussi par les hommes de Jimmy Hoffa, dans les mois qui précédèrent sa mort.

     

    Jimmy Hoffa

    Jimmy Hoffa avait des liens avec la Mafia. L'ancien patron du très puissant syndicat des camionneurs a disparu sans laisser de traces en juillet 1975.United States Federal Government

     

    Robert Kennedy sera, lui-même, assassiné le 5 juin 1968 par Sirhan B.Sirhan, un immigré palestinien.


    Mais, là encore, la culpabilité du meurtrier présumé est sujet à controverse.

     

    Un président entre dans la légende

     

    " Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, demandez-vous plutôt ce que vous pouvez faire pour votre pays ", déclare John Kennedy dans son discours inaugural du 20 janvier 1961.

    A sa mort, les résultats de son généreux programme sont encore maigres et l’Amérique est en état de choc.


    Pourtant, en quelques années, John Kennedy a su incarner le renouveau du rêve américain.

     

    John Kennedy

    John Kennedy est entré dans la légende. United States Federal Government

     

    Les raisons de sa mort restent obscures. Les hypothèses sont nombreuses et oscillent entre l’ange et le démon.

     

    Kennedy était-il un martyr abattu pour sa politique courageuse ? A l’inverse, son assassinat a-t-il été la conséquence des actions discutables d’un homme moins vertueux que la légende ne le dit ?

     

    V.Battaglia (05.01.2006)

     

    Références

    Note : Wilfried Huismann est l'auteur de plusieurs documentaires remarqués, notamment un documentaire sur le Kremlin et l'espionnage intitulé "Roulette russe", et a effectué trois ans de recherches sur l'assassinat de Kennedy.

    Chroniques du 20e siècle. Editions Chronique 2000
    John Kennedy. Encyclopédie Larousse 2005
    Les plus célèbres mystères de l’histoire, sélection du Reader’s Digest 2004

     

    Histoire Moderne:  Qui a assassiné John Kennedy ?

     

     

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    Martin Luther King
     
     

    C’est en 1968 que le destin du grand leader noir, Martin Luther King, s’achève brutalement. Assassiné à Memphis par James Earl Ray, Martin Luther King s’est battu toute sa vie contre la ségrégation raciale qui sévit aux Etats-Unis.


    Ce pasteur est devenu le symbole de la lutte pour l’égalité des droits civiques. Pourtant, Martin Luther King n’a pas fait l’unanimité, aussi bien chez les Blancs que chez les Noirs. Inquiétant pour les premiers ou trop modéré pour les seconds, cet apôtre de la non-violence a été tué dans des circonstances troubles.
    Son assassin présumé est mort en prison en clamant son innocence et les dernières analyses balistiques n’ont pas élucidé ce meurtre.

     
     
     

     

     Le début d’un combat

     

    Né en 1929, à Atlanta, Martin Luther King est issu d’une famille bourgeoise. À dix-huit ans, il décide de devenir pasteur, comme son père, dans l’Église baptiste.

     

    Bien qu’il n’ait pas connu la pauvreté, il est très tôt confronté à la discrimination raciale. Mais, il est convaincu qu’il faut appliquer les principes chrétiens aux problèmes sociaux et se préoccuper des âmes aussi bien que des conditions économiques et sociales qui agissent sur elles.

     

     

    Martin Luther King en 1964. Library of Congress

     

    Grand admirateur de Gandhi, c’est un pacifiste dans l’âme. Sa lutte courageuse est celle de l’amour contre le mal. La non-violence est pour lui le seul moyen d’atteindre l’objectif.


    En 1954, il est revenu dans le Sud. On lui a confié la direction d’une paroisse à Montgomery, dans l’Alabama, une ville de 120 000 habitants dont 50 000 Noirs.


    À la fin de 1955, une passagère noire, Rosa Parks, refuse de se plier aux règles de la ségrégation qui règne dans les autobus.
    Elle s’assoit à une place réservée aux Blancs. Elle est aussitôt arrêtée. Cette fois, la communauté noire décide de réagir.

     

    Library of Congress

     

    L’activité politique du révérend Martin Luther King commence alors avec le boycott des autobus d’Alabama.


    Les dons et les encouragements affluent de partout. Les Noirs de la ville marchent à pied ou mettent en place leurs propres moyens de transport ; ils refusent d’acheter chez les commerçants qui leur sont hostiles ; ils ne répondent pas aux provocations à la violence du Ku Klux Klan.

     

    Ecole réservée aux Noirs en 1917 en Oklahoma. Library of Congress

     

    Après un boycottage d’un an, les tribunaux fédéraux déclarent illégale la ségrégation dans les transports. La victoire est acquise, grâce à la non-violence et avec l’appui des libéraux blancs.

     

     

    La lutte pour l’égalité des droits civiques

     

    Dès 1957, Martin Luther King réunit les pasteurs noirs du Sud dans une « Southern Christian Leadership Conference ».


    Peu à peu, la Cour suprême impose l’ouverture à tous des piscines, des plages, des cafétérias, des églises.

     

    Martin Luther King et Malcom X en mars 1964. Library of Congress

     

    Le mouvement acquiert une force supplémentaire avec l’arrivée au pouvoir du président Kennedy. En 1963, Martin Luther King mène une dure campagne contre la ségrégation à Birmingham, dans l’Alabama. En même temps, il organise une marche sur Washington pour pousser un Congrès réticent à voter la loi sur les droits civiques.

     

    Marche pour l'égalité en 1963. Library of Congress

     

    S’adressant à plus de 200 000 personnes présentes et à des millions de téléspectateurs, il déclare :
    « J’ai encore un rêve. Mon rêve fait partie du rêve américain. Je rêve qu’un jour notre pays se décidera à appliquer véritablement ses principes, d’après lesquels nous tenons ces vérités pour évidentes que les hommes sont nés égaux. »

     

    Cette déclaration touche le cœur de nombreux américains et le révérend connaît alors une grande popularité.
    En 1964, il reçoit le prix Nobel de la paix et le président Johnson fait voter deux lois sur les droits civiques, qui posent les fondements de sa « Grande Société ».

     

     

    L’opposition du Black Power

     

    La non-violence préconisée par Martin Luther King ne fait pas l’unanimité au sein de la communauté noire.


    Après plusieurs siècles d’esclavage et de ségrégation, les jeunes noirs des ghettos veulent tout et tout de suite.

     

    Marche à Washington en 1963. Library of Congress

     

    Une émeute éclate en 1965 dans le ghetto de Los Angeles à Watts et se propage en 1966-1967 dans les autres ghettos.
    Auprès des partisans du « Black Power », King jouit d’un grand prestige mais fait figure de modéré.


    Face aux violences, les libéraux blancs sont décontenancés et prennent peur, tandis que la majorité silencieuse adopte une attitude plus rigide à l’égard des Noirs.

     

     

    Les combats de Martin Luther King

     

    En 1967, le révérend manifeste son hostilité vis-à-vis de la guerre du Viêt Nam. Mais, cette prise de position est loin de faire l’unanimité. Les Blancs libéraux aussi bien que la bourgeoisie noire ne le suivent pas.


    Le 4 avril 1968, il est à Memphis pour apporter son soutien aux éboueurs, tous noirs, qui sont en grève. Il est assassiné sur le balcon de son hôtel, officiellement par James Earl Ray.
    Dès que l’on apprend dans les ghettos l’assassinat de King, des émeutes se déclenchent.

     

    Emeutes après l'assassinat. Library of Congress

     

    Le déplacement à Memphis était la dernière étape avant la « Marche des pauvres gens » qu’il devait organiser à Washington. Ce projet inquiétait beaucoup le FBI qui craignait des émeutes.
    J.Edgar Hoover, le directeur du FBI, se méfiait de ce révérend noir. Il l’avait surnommé Zorro et le considérait comme un communiste.


    Le FBI avait déjà fait plusieurs tentatives pour saborder le mouvement en salissant la vie privée de son leader. Le révérend était sous surveillance constante et sa ligne téléphonique sur écoute.

     

     

    L’assassinat de Martin Luther King

     

    Le leader noir est abattu le 4 avril 1968, alors qu’il se trouve au balcon du motel Lorraine, à Memphis.


    Peu après le meurtre, Ray est arrêté. La police prétend qu’il a agit seul. Il aurait abattu le révérend d‘une balle de fusil, en tirant d’une chambre d’hôtel.


    Ray proclame son innocence mais son avocat lui conseille de plaider coupable s’il veut éviter la chaise électrique.

     

    Library of Congress

     

    Les indices sont accablants. Ray accepte et il est condamné à 99 ans de prison. Il se rétracte trois jours après le verdict mais n’obtiendra jamais la révision de son procès.


    De nombreuses contradictions et zones d’ombre subsistent dans cette affaire. Tout d’abord, les différentes analyses balistiques, y compris celle de 1997, n’ont jamais pu démontrer que la balle avait été tirée avec le fusil de Ray.

     

    Motel Lorraine aujourd'hui. By Bwalsh . (CC BY-NC-ND 3.0)

     


    Dans cette affaire il n’existe qu’un seul témoin oculaire, Charles Stephens, et son témoignage est plus que douteux.


    En premier lieu, il est très imprécis, parlant d’un homme de petite taille (Ray mesure 1,80 m) qu’il aurait vu de dos.


    Charles Stephens est un alcoolique qui a laissé plusieurs milliers de dollars de dettes dans les nombreux bars qu’il fréquente.


    Comme par magie, ses dettes sont effacées et il retrouve alors la mémoire, en désignant Ray comme coupable.


    Il est à souligner qu’il reviendra d’ailleurs sur son témoignage devant les caméras de la télévision. Son épouse, également présente le jour du meurtre, a toujours contesté ce témoignage. Elle est rapidement placée dans un hôpital psychiatrique.

     

    Hôtel d'où Ray aurait tiré. By Veniaxcrusis. (CC BY-NC-ND 3.0)

     

    Plusieurs témoins affirment avoir remarqué des mouvements dans le bosquet situé en face du balcon. Un journaliste du New York Times, qui résidait au motel Lorraine, soutient avoir vu de la fumée sortir du bosquet.


    Mystérieusement, les arbustes incriminés seront arrachés dans la nuit.

     

    Initialement, le pasteur ne devait pas se trouver au premier étage du motel mais au rez-de-chaussée. La veille du meurtre, un homme prétendant appartenir à l’équipe de sécurité, avait demandé au directeur de changer le pasteur de chambre. Cet homme n’a jamais été retrouvé.


    Le jour du meurtre, l’escorte policière du pasteur a été réduite de 8 à 2 hommes. Sur l’ordre de qui ?

     

    En 1976, la Chambre des représentants du Congrès américain désigne une commission qui doit enquêter sur cette affaire. Elle entérine la culpabilité de Ray mais conclut qu’il n’a peut-être pas agit seul.


    Elle clôt le dossier et interdit l’accès aux archives pendant 50 ans, soit jusqu’en 2029. Pourquoi ?

     

    Quelques secondes après le coup de feu fatal. Library of Congress

     

    Depuis, il y a eut plusieurs rebondissements mais aucune preuve n’est venue étayer l’hypothèse d’un complot.


    Le gouvernement américain avec l’aide du FBI a-t-il fomenté l’assassinat du pasteur ? Le FBI a-t-il agit seul ?


    En juin 2000, une nouvelle enquête gouvernementale a conclu à la culpabilité de Ray en concluant qu’il avait agit seul.

     

    Autant dire que les avis sont très divisés. Les circonstances exactes de la mort de Martin Luther King sont beaucoup trop confuses pour que l’on ne se pose pas de questions. D’autant plus que les motifs de Ray n’ont jamais été déterminés. Il n’appartenait à aucun mouvement politique.


    Cette affaire nous rappelle bien sûr l’assassinat de John Kennedy. Il faudra attendre 2029 pour avoir connaissance de tous les documents relatifs à l’affaire. Et encore, rien ne dit que ces archives nous permettront de connaître la vérité.

    V.B (23.05.2007)

     

    Références

    Révolution Non Violente; Martin Luther King. Payot 2006
    Historia N° 664. 2002
    L'assassinat De Martin Luther King. Collection Marshall Cavendish

     

    Histoire Moderne:  Martin Luther King

     

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